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Bio/Milieu du X

Un gay à la tête du porno hétéro !

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Nous avons interviewé, une fois n’est pas coutume, notre rédacteur en chef Christophe Soret, qui, du haut de ses 22 ans de carrière dans le monde adulte (comme il aime à le préciser), nous livre son analyse et nous conte une drôle d’histoire, celle d’un gay qui gère plus de sept magazines porno hétéros !

Christophe peux-tu nous rappeler dans les grandes lignes ton parcours ?

À 25 ans, tout frais sorti de ma « respectable » école de commerce, j’ai créé ma première société de vente de CD-ROM adultes. Passionné de jeux vidéo, nous voulions avec mon premier associé, nous lancer dans ce business, mais nous avons très vite vu que les cédéroms porno marchaient bien mieux ! Le succès fut donc rapide, et m’a permis de connaître tout le monde puisque nous achetions des droits aux principaux réalisateurs comme John B. Root, ou boîtes de prod comme Vivid. Par la suite, je suis devenu consultant internet pour les plus grosses sociétés du porno comme Cam4, Netechangisme devenu Wyylde, Dorcel, et Citebeur chez les gays.

Depuis presque trois ans, je gère des magazines X entre autres parce que Michel de J&M m’a fait confiance et m’a proposé de développer sa marque en kiosque. Il a ensuite racheté le groupe Hot Vidéo, j’ai tout naturellement récupéré Hot que j’ai continué en le déclinant, et en lui donnant plus de variantes comme le numéro Spécial, qui est sur une thématique différente à chaque parution, ou encore le dernier né, Hot Vidéo Confessions, plus féminin, libertin et destiné aux couples.

Un gay peut-il comprendre comment fonctionne le porno hétéro ?

Oui ! Et heureusement. J’ai toujours aimé ce milieu qui est avant tout précurseur sur les nouvelles « technologies » : audiotel, Minitel, Internet, Smartphone… Les éditeurs adultes ont toujours été les premiers à proposer du contenu payant et souvent très rémunérateur sur ces supports qui évoluaient avec nous dans le temps. Cela t’oblige à sans cesse te remettre en cause, suivre les nouvelles solutions de paiement, adapter ta communication. Tu es, de ce fait, toujours dans le coup car c’est un marché international très concurrentiel. Si tu t’endors, tu ne survis pas. Le fait d’être gay ne change rien à mon souhait qui était de connaître les personnes incontournables et de travailler avec elles. J’ai appris à reconnaître une actrice X qui a du potentiel, à anticiper les tendances en contenu qui feront les ventes de demain (comme le créneau amateur que J&M a si bien développé sur le web, après que Lætitia l’a fait en VHS). Le fait que je sois homo ne m’a jamais empêché de m’épanouir dans ce milieu et peut être d’avoir des rapports plus simples avec les filles…

Tu as dû, en 20 ans, rencontrer des gens passionnants ?

C’est aussi l’intérêt de ce milieu qui est avant tout fait de rencontres qui se font dans un bureau, mais aussi largement en soirées. Car la fête régnait en maîtresse à une époque et il fallait être dans les events les plus importants comme les Hot d’or que j’ai coorganisé en 2009 grâce à la confiance que m’avait accordée Franck Vardon (l’ancien et talentueux créateur et rédac’chef de Hot Vidéo) et son associé Gilles. Voir la planète entière débarquer en grande tenue, participer à un repas avec 1 500 invités, un tapis rouge avec plus 300 journalistes restera un de mes plus grands souvenirs professionnels. J’ai eu aussi la chance de rencontrer les plus grandes actrices du moment comme Katsuni, Jessy Jane, et toutes les Vivid Girls de l’époque. Fréquenter Brigitte Lahaie qui avait déjà fait sa reconversion, mais aussi Estelle Desanges, la ravissante Lou Charmelle, Ovidie, Clara Morgane et plus récemment la sulfureuse Nikita Bellucci.

J’ai aussi croisé la route, à de nombreuses reprises, de Rocco, Manuel Ferrara et tous les grands réalisateurs comme Pierre Woodman qui faisait le succès de Private ou Marc Dorcel qui est, avant tout, un artiste. Tous ces gens donnent un parfum à mon métier que j’aurais eu du mal à trouver ailleurs et qui font que j’ai traversé tout ça avec beaucoup de plaisir.

Et aujourd’hui c’est comment ? Moins drôle non ?

En effet ! Le champ des possibles s’est restreint : Internet et les tubes ont tout changé, il y a moins de moyens puisque presque tout est gratuit. De fait les actrices font des carrières plus courtes, le phénomène de « starisation » n’existe plus qu’aux USA qui restent le premier marché mondial, les grandes cérémonies ont en partie disparu. Mais on a su, comme toujours, évoluer. Les magazines porno papier, par exemple, continuent de marcher grâce à un socle de lecteurs qui préfèrent un support qui reste souvent un objet de collection. Les meilleurs éditeurs arrivent à vendre des scènes originales et garder des abonnés qui croient en leurs produits. Les actrices tournent en moyenne entre trois et cinquante scènes puis passent à autre chose… Mais la VOD sur des opérateurs Internet comme Free ou Orange qui ont des canaux porno, a apporté une bouffée d’oxygène. Hot Vidéo et Jacquie & Michel y sont présents et ont su rebondir. Pink TV en gay est sur le même modèle d’abonnés. Il faut certainement être un meilleur gestionnaire qu’il y a dix ou vingt ans pour que ton business puisse continuer dans de bonnes conditions.

Et dans dix ans, comment vois-tu les choses ?

Vaste perspective, même si ce sera vite là. Les contenus 3D, la réalité virtuelle et le 360 degrés devraient avoir pris le pas, si nous avons des téléviseurs qui intègrent ces technologies, sans la nécessité de lunettes qui restent contraignantes et freinent leur lancement à grande échelle.

Là aussi le secteur adulte a su être précurseur, les plus gros éditeurs se sont déjà penchés dessus depuis quatre ou cinq ans. Le porno est par ailleurs rythmé par des modes et des tendances « contenu » qui relancent la consommation. Le gonzo en son temps, les Milfs, l’amateur plus récemment… Demain ce sera peut-être des contenus de meilleure qualité ou des tendances sexuelles plus poussées et extrêmes qui auront la cote. Le fétichisme me semble par exemple gagner du terrain et rentrer dans la vie de plus en plus de personnes.

Enfin l’interactivité et les accessoires réalistes comme les étuis pour pénis viendront compléter notre visionnage du porno, le rendant plus jouissif puisqu’ils reproduiront à la perfection ce que vous regarderez. Une bonne pipe ou une pénétration endiablée produiront alors beaucoup plus d’effets. De quoi intéresser pas mal d’utilisateurs un peu trop seuls !

Michael Cock est journaliste et archiviste : il suit l'actualité et l'évolution de la communauté gay depuis plus de 20 ans. Militant de santé sexuelle, les nombreuses confidences qu'il a recueillies lui permettent de relativiser sur les sexualités. De formation scientifique et théâtrale, il décrypte avec humour et logique l'inconscient sexuel de tous les sujets trop sérieux. Il contribue régulièrement pour Garçon Magazine.

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