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L’orgasme féminin, comment ça marche ?

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Pourquoi certaines femmes parviennent à l’orgasme en quelques secondes, tandis que d’autres ne l’ont jamais connu ? Parfois imprévisible, moins « mécanique » que celui des hommes, il relève de nombreux paramètres, notamment émotionnels. On fait le point sur ce que l’on sait, aujourd’hui, du plaisir féminin.

La définition de l’orgasme féminin généralement admise en médecine est la suivante : « succession de mouvements musculaires dans le cadre d’une activité sexuelle » (Wikipédia). Selon le modèle de Masters et Johnson, l’orgasme constitue la troisième phase de la réponse sexuelle, qui conclue celle du plateau, et précède celle de la résolution. La durée d’un orgasme féminin est de vingt secondes en moyenne, contre six chez l’homme. Pour le décrire le plus précisément possible, il faut prendre en compte à la fois les réponses corporelles, et les composantes émotionnelles.

Les réponses corporelles

L’orgasme est d’abord une réponse physiologique à un état d’excitation sexuel maximal. Il consisterait donc en la libération d’une tension sexuelle (même si parfois, un seul orgasme ne suffit pas à soulager cette tension). Pendant l’orgasme, le périnée, l’utérus, le vagin et l’anus se contractent. Le clitoris se rétracte sous le prépuce. Deux protéines neurologiques sont libérées : l’ocytocine et la prolactine, provoquant une sensation de bien-être. Le taux de prolactine reste élevé jusqu’à une heure après l’orgasme. Voilà des phénomènes qui devraient mettre tout le monde d’accord ! Mais non, les scientifiques discutent encore de ces phénomènes physiques locaux, certains considérant, par exemple, que les contractions périnéales font partie de l’orgasme, et d’autres non.

Orgasme vaginal et/ou clitoridien

En revanche, les chercheurs s’accordent sur la nécessité, pour que les femmes atteignent l’orgasme, d’une stimulation clitoridienne. Freud avait nettement distingué les deux orgasmes, le clitoridien et le vaginal, l’un étant immature et l’autre résultant d’un apprentissage. Selon le père de la psychanalyse, il n’existerait qu’une seule « bonne manière de jouir », et elle serait exclusivement vaginale. Cette distinction est totalement ringarde aujourd’hui ! Le psychiatre Philippe Brenot affirme même que le clitoris est le seul organe du plaisir chez la femme. Cette idée avait déjà été exposée par Masters et Johnson, dont les travaux ont montré que même l’orgasme « vaginal » a pour origine une stimulation clitoridienne. Ces observations ont été confirmées par l’observation de femmes se livrant à la masturbation. Selon le rapport Hite, elles ne sont que 5% à pratiquer la pénétration vaginale à l’aide d’un objet lorsqu’elles se masturbent. L’absence de sensibilité du vagin, due à sa faible innervation, est certainement en cause. Il n’existe aucune étude concernant les causes d’une possible érogénéité du vagin.

Les sexologues actuels soulignent le rôle prépondérant du clitoris dans l’orgasme, mettant en avant les ramifications profondes de cet organe (mesurant entre 10 et 11 cm), notamment autour du vagin. Ces mêmes ramifications expliquent sans doute que l’on ait pu tenter de localiser une zone très sensible sur la paroi antérieure du vagin appelée Point G. Aujourd’hui, aucune observation n’a permis de confirmer son existence, que certains chercheurs considèrent pourtant comme une réalité sexologique. Le docteur Pierre Foldès, qui est intervenu sur plus de trois mille patientes excisées pour des reconstructions clitoridiennes, considère que le point G n’est que la partie interne du clitoris. Pourtant, la distinction orgasme vaginal/orgasme clitoridien a la vie dure, et les femmes continuent à décrire deux orgasmes différents, « l’orgasme clitoridien obtenu par stimulation du clitoris externe et l’orgasme dit vaginal obtenu par pénétration vaginale sans stimulation concomitante du clitoris externe. L’orgasme clitoridien est décrit comme un chatouillis aigu, un peu électrique et chaud. L’orgasme dit vaginal est rapporté comme un élancement plus intense et voluptueux déclenchant parfois plusieurs vagues de plaisir. L‘orgasme clitoridien est plus facile à obtenir sans doute parce que la vulve et le gland clitoridien sont connus des petites filles depuis l’enfance (…) La cavité vaginale n’est pas une région d’emblée associée au plaisir et la première pénétration vaginale nécessite de s’habituer à cette nouveauté sensorielle proposée au corps féminin. En fonction de l’histoire et du développement personnel de la femme, ainsi que du degré d’intimité envers son partenaire, la pénétration vaginale peut se révéler de plus en plus plaisante voire finir par déclencher un orgasme » (Odile Buisson, avec Pierre Foldès, Qui a peur du point G ?). Ainsi, le cerveau se charge d’associer stimulation du clitoris et pénétration vaginale, pour parvenir jusqu’à l’orgasme.

L’étude des changements physiologiques au moment de l’orgasme ne suffit pas à rendre compte de celui-ci en tant qu’expérience sexuelle. De multiples facteurs psychologiques encore peu connus interviennent dans l’orgasme. On sait qu’un rêve érotique, ou la simple évocation d’un fantasme, par autosuggestion, peut déclencher un orgasme, de même intensité que lors d’un rapport sexuel. Cela nous rappelle l’aspect essentiellement cérébral de l’orgasme, qui est aussi la plus mystérieuse. L’intensité et la fréquence des orgasmes sont liés à la manière dont chaque femme participe à sa vie sexuelle, en ayant conscience de sa propre excitation et des possibilités de son corps. Odile Buisson affirme que « décrire les particularités du plaisir féminin ne nous renseigne pas beaucoup sur son exacte nature. Est-ce un phénomène réflexe qui entraine une cascade d’événements déterminés mais variables, ou bien s’agit-il d’un phénomène appris par la culture du corps et de l’esprit ? »

Il serait évidemment réducteur de penser l’activité sexuelle féminine comme une succession de phases s’enchainant, toujours dans le même ordre : désir–excitation–orgasme–résolution. Ce serait oublier qu’une femme peut accepter un rapport sexuel sans éprouver de désir. Que ce dernier peut advenir pendant l’excitation. Même s’il est difficile de l’admettre, un orgasme peut se produire lors d’un acte sexuel forcé, sans désir. Enfin, des troubles de l’orgasme peuvent se manifester alors que le désir et l’excitation sont là.

C’est dire à quel point la sexualité féminine est complexe.

Qu’est-ce qu’un trouble de l’orgasme ?

On dit qu’il y a trouble de l’orgasme quand celui-ci ne survient pas après une phase normale d’excitation. C’est un problème fréquemment évoqué en consultation de sexologie. Le travail du sexologue consiste à travailler avec la patiente pour déceler ce qui peut empêcher la survenue de l’orgasme. Et contrairement aux idées reçues, ce n’est pas toujours de la faute des hommes ! En raison de la variabilité des cas, et de la complexité de la sexualité de chacun, on ne parle de trouble de l’orgasme que si cet état cause une détresse, et a des répercussions sur le bien-être du couple. L’anorgasmie peut être primaire (si la femme n’a jamais connu d’orgasme), secondaire (si elle en a déjà connu), absolue ou situationnelle.

Plusieurs facteurs peuvent bloquer l’orgasme : mauvaise respiration, périnée relâché, stress, accouchement traumatique, éprouvé de culpabilité, antécédents d’abus sexuels, méconnaissance de son corps, impossibilité à « lâcher prise »… Des recherches menées en 2016 à l’Indiana University (États-Unis) ont mis en avant de possibles causes anatomiques. Elizabeth Emhardt, auteure principale de l’étude, s’est demandé si l’anatomie ne serait pas « à la base des différences en matière de vécu sexuel », et conclut que si certaines femmes ont du mal à atteindre l’extase, c’est parce que leur clitoris serait trop éloigné de la paroi vaginale. Selon les chercheurs, certaines positions comme l’amazone seraient alors plus favorables à l’orgasme. Ils ont même calculé l’angle de pénétration idéal : entre 30° et 40° !

La masturbation dirigée

Le professeur Cindy Meston, de l’université d’Austin (Texas), propose, pour soigner les troubles de l’orgasme, un traitement comportementaliste appelé masturbation dirigée. La femme doit s’entraîner à localiser et visualiser les zones de son corps qui lui procurent le plus de plaisir. Dès qu’elle parvient à obtenir un orgasme, le partenaire est convié pour que la patiente ait un orgasme en sa compagnie. Selon cette approche, il existe un lien étroit entre la fréquence des masturbations et la capacité d’avoir des orgasmes.

Il existe d’autres méthodes comportementales, comme l’alignement coïtal, qui permet une bonne excitation du clitoris : il s’agit d’un missionnaire classique, mais l’homme va légèrement remonter le bassin. Au lieu de multiplier les va-et-vient, on accentue les frottements entre l’os du pubis de l’homme et le clitoris, pour mieux le stimuler. Mais n’oublions pas qu’il n’existe pas de recette miracle pour obtenir un orgasme, ni une méthode supérieure à une autre !

Encadré :

Une étude du Guardian, réalisée sur 52000 personnes grâce à un questionnaire en ligne, et publiée début 2017 dans le journal Archives of sexual behavior, a confirmé ce dont on se doutait depuis longtemps : homme et femmes ne sont pas égaux face à l’orgasme, loin de là ! 95% des hommes hétérosexuels déclarent avoir un orgasme lors de chaque rapport, contre 65% des femmes hétérosexuelles ou bisexuelles.

Du côté des femmes homosexuelles, 86 % d’entre elles atteignent presque toujours l’orgasme et 89% pour les hommes homosexuels.

30% des hommes pensent encore que la pénétration est le meilleur moyen pour une femme d’avoir un orgasme ! Les idées reçues ont la vie dure !

35% des femmes hétérosexuelles déclarent avoir un orgasme après une pénétration vaginale. A contrario, elles sont 80% (et 91% pour les lesbiennes) à avoir toujours un orgasme après une combinaison des trois actes cités plus haut.

Les femmes qui ont testé de nouvelles positions, mis de la musique ou ont dit « je t’aime » lors de leur dernier rapport sont 20% plus nombreuses à connaître l’orgasme régulièrement. Curieusement, ces paramètres n’affectent pas le plaisir masculin. Comment ça, vous n’êtes pas étonnés ?

Pierre Des Esseintes est auteur et journaliste, spécialisé dans les questions de sexualité. De formation philosophique, il est également sexologue. Il a publié, aux éditions La Musardine, Osez la bisexualité, Osez le libertinage et Osez l’infidélité. Il est aussi l’auteur, aux éditions First, de Faire l’amour à un homme et 150 secrets pour rendre un homme fou de plaisir.

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