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C’est quoi le porno gay arty ?

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Se branler vite fait, c’est cool et ça fait du bien. Mais certains ont la branlette plus subtile que d’autres, n’aiment pas se sentir « sale » après avoir regardé une vidéo amateur où un mec de l’Est se fait prendre bareback par un bourrin, le tout avec un filmage crade et tremblant. En opposition aux milliers de vidéos jetables des tubes et aux éternels clichés des gros studios historiques, depuis une décennie s’est développé un porno gay alternatif, plus « auteuriste » et respectueux. Pour bander propre et sans complexes ?

La recherche du beau

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Les gros labels dits « mainstream » doivent aujourd’hui faire face à deux concurrents. Le premier, le plus redoutable, est le tube. On en compte des dizaines, des centaines, et les tubes ont cette carte inimitable de l’authenticité, la saveur de l’excitation d’une vidéo volée. Quoi de plus bandant que de violer l’intimité d’un mec lambda, de son voisin ? Le porno gay arty ou d’auteur, deuxième concurrent plus discret mais en expansion permanente, cherche lui aussi à retrouver cette forme de « vérité ». Mis à part les fans de la première heure et les clients old school, qui aujourd’hui trouve encore hot les vidéos de mastodontes comme Falcon ou Hot House où des porn stars musclées baisent dans un décor industriel, sans histoire ni situation crédible ? Marre des mises en place grotesques et poussives à base de faux hétéros, de livreurs de pizza / plombiers / docteurs ou flics aux déguisement kitschs ? Sceptiques face aux modèles qui ont le regard aussi expressif qu’un poisson mort et récitent leur texte comme des robots ? Des enfilades trop directes, anonymes, interchangeables ? Le porno arty tente de retrouver ce qu’il y a de beau dans le sexe et de le mettre en valeur : l’attente, la frustration, le parfum de perversité, la sensualité, l’échange, l’alchimie, la tendresse.

Ceux qui militent pour un porno premium et plus humain sont des personnes qui croient autant en l’amour, en la sensualité qu’au cinéma. Ils considèrent le porno comme de l’art, une façon de raconter des histoires à base de corps, de bites et de regards. Et le sexe de redevenir un moyen d’expression, un langage plutôt qu’un défouloir.

Bons sentiments

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Le porno gay arty se veut avant tout éthique. Modèle du genre, Cockyboys présente sur son site un manifeste qui garantit que les modèles sont bien traités, qu’ils choisissent leurs partenaires, qu’ils prennent du plaisir. Les textes des vidéos sont chauds mais jamais humiliants pour les passifs. On met l’accent sur le désir plus que sur la défonce. Les photos sont jolies et magnifient les garçons, les vidéos sont belles et jouent la carte de l’érotisme. Mais surtout, les intros sont soignées, les porn stars bien présentées. Un garçon Cockyboys est un garçon avec de la personnalité et une histoire. Le label propose un porno « sans culpabilité », qui raconte des gens et des histoires. Torride, érotique et propre en même temps.

Dans la même veine, Icon male mise tout sur la sensualité et la langueur, de quoi contrebalancer des intrigues qui restent assez cheesy et clichées.

Le meilleur exemple du genre reste le court-métrage de Travis Mathews, I want your love : deux jolis mecs au charme très naturel qui discutent longuement, faisant monter la sauce, et qui finissent par coucher ensemble. Un acte d’amour, un mélange de douceur et de ferveur, du plaisir et un petit parfum de mélancolie. Le même Travis Mathews a délivré une série documentaire, In their room, qui explore la sexualité de garçons américains ou allemands tout en ne ratant rien de leurs branlettes ou plans culs. Le charme de l’authentique avec une photo chiadée et un point de vue de réalisateur. On peut regarder ça juste pour sa cinéphilie ou pour cracher un coup.

Branlette intellectuelle

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Forcément, la voix de l’arty ouvre la porte à des styles très différents. Et ainsi sont classés dans la catégorie porno des vidéastes qui ne cherchent pas forcément à faire jouir le spectateur. C’est le cas par exemple d’Antonio Da Silva, chef de file de la nouvelle vague du porno gay. Il explore tous ses fétichismes en montant des films courts qui oscillent entre interviews, solos, images volées en caméra cachées… Les roux, les daddies, le sexe dans les toilettes publics, les plages naturistes du Portugal : tout y passe et est décortiqué avec une réalisation au top, un sens du cadre qui force le respect et une bonne dose d’humour. A chaque passage dans des festivals, les films de Da Silva raflent prix et applaudissements en rafale. L’auteur lui-même dit ne pas considérer faire vraiment du x, il « filme la sexualité ». Nuance.

La démarche est intello mais elle est assez essentielle : cela fait toujours du bien de voir le sexe représenté à l’écran, de façon positive, joueuse, insolente, libre.

Antonio Da Silva a fait depuis des petits comme Damien Moreau, ex modèle de chez Kink, qui filme les étreintes entre mecs de façon hautement fantasmatique (à travers sa vidéo Kangourou) ou poétique (sa série documentaire OH BOY qui dresse des portraits de garçons et de filles qui finissent par jouir).

Moins théoriques et plus dans la pratique, on peut retrouver Noel Alejandro (disciple de la très en vogue Erika Lust qui a réalisé un petit chef d’œuvre avec son court Eloi & Biel sur une première fois entre deux garçons avant de filmer des plans culs superbement réalisés mais bizarrement bareback avec Bad Medicine et Roomies) ou Pretty Vacant Boys (qui a livré une sorte de pendant plus radical de ce que fait Cockyboys avec le long AKA Fuck et s’est également spécialisé dans les récits filmés érotiques).

Certains réalisateurs « tradis » et underground se plaisent aussi à passer de la pornographie au non explicite comme le culte Bruce LaBruce ou le plus confidentiel mais non moins agité Todd Verow.

Quel business pour cet « alt porn ? »

kangourou

Si Cockyboys se dit particulièrement satisfait de ses ventes et s’est imposé comme un poids lourd dans l’industrie, les vrais indépendants ont plus de mal à rentrer dans leurs frais.

Les auteurs cherchent une nouvelle façon de monétiser leurs productions. Ils développent des fan bases prêtes à payer plus pour avoir un produit de qualité. Ils essaient de s’auto financer, ont parfois recours au crowd-funding ou alternent projets mainstream et plus ambitieux pour trouver leur équilibre financier.

Le vidéaste Antonio Da Silva fait ici figure de pionnier : chacune des recettes d’un de ses films permet de financer le suivant. Et petit à petit le public s’élargit et les possibilités de produire davantage deviennent possibles. L’auteur aimerait à terme former autour de lui une bande de réalisateurs indés et lancer une plate-forme dédiée à cette vision différente de la sexualité gay.

aka fuck

Leurs soutiens , ces réalisateurs de « alt porn » les trouvent grâce à une presse gay spécialisée ou branchée. Leur travail s’épanouit aussi et surtout grâce à des festivals underground au succès grandissant. Le summum du genre n’est autre que le fameux Porn Film Fest de Berlin où tous les types de porno et de sexualité se mélangent le temps de projections et performances suivies de débats et rencontres passionnés. En France cette année un nouvel événement, le What the fuck fest, devrait au mois de juillet 2016 remettre le « bon porn » à savourer sur grand écran à l’honneur.

Rebelle, militant, adepte du beau, le porno gay arty tient à revenir à une vision gracieuse et hédoniste de la sexualité, comme au temps de l’âge d’or des années 1970 où l’on voyait des bons films de boules au cinoche en 16mm. Idéalistes ? Peut-être… Mais après avoir regardé 30 double pénés et bukkakes, se faire un petit film où les mecs prennent vraiment du plaisir avec une belle image, ça lave aussi le cerveau et c’est bon pour le moral non ?

Thomas s'abreuve de porno depuis ses 15 ans. Après les premiers émois des VHS hétéros, il développe une passion débordante pour le x gay alors qu'Internet fait son apparition. Pornophage et curieux, tous les genres et fétiches attisent sa curiosité. Il partage ses fantasmes et addictions sur son propre blog, Gaypornocreme, et régulièrement pour le magazine gay Qweek.

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