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Voyages intérieurs : le plaisir solitaire au féminin

Oui, les femmes se masturbent, au moins autant que les hommes. Comment font-elles ? Comment en parlent-elles ? Quels sont les enjeux de la masturbation féminine ? Enquête au cœur du plaisir féminin.
Une pratique tabou ?
La masturbation est rarement considérée comme une activité sexuelle à part entière, mais plutôt comme un moyen de compenser l’absence de partenaire. Or, la masturbation n’est pas forcément liée à la frustration. Digitale ou instrumentale, indissociable du fantasme, elle est d’abord, pour la femme, une possibilité d’arriver seule à l’orgasme.
La masturbation est, dans l’enfance et l’adolescence, une pratique naturelle. On ne l’apprend pas. La jeune fille qui porte sa main entre ses cuisses obéit d’abord à un instinct. Ce n’est qu’à l’adolescence qu’elle prend conscience du caractère sexuel de cette activité. L’esprit, dès lors, accompagnera le corps et l’autorisera ou non à assumer cette satisfaction auto-érotique. La culture entre en jeu, et avec elle son lourd héritage de culpabilité. De même que le plaisir sexuel féminin a été mis entre parenthèses pendant des siècles, la masturbation féminine a longtemps été considérée comme tabou. La pratique l’est encore, et cela n’a rien de surprenant puisque le terme même de masturbation provient du latin « manus » (la main) et « stupratio » (action de souiller).
La peur du plaisir féminin
La domination masculine est un universel des sociétés humaines. L’homme, en soumettant la femme, entend contrôler sa descendance, mais aussi ce mystère qu’est pour lui la sexualité féminine. Aujourd’hui encore, en Afrique et au Moyen-Orient, l’excision fait de la femme la propriété de l’homme, en la privant de son plaisir. Certaines sociétés vont même plus loin dans l’horreur : la femme peut être privée de son clitoris, mais aussi des lèvres de son sexe. En Occident, l’excision se pratiquait encore au début du vingtième siècle. L’ablation du clitoris était censée prévenir les désordres mentaux. Le sexe était un plaisir réservé aux hommes, et pour la femme un devoir de s’y soumettre, sans aucune considération pour son propre plaisir. Il y a un seulement un demi-siècle, l’existence même de l’orgasme féminin était contesté, voire nié. Comment une fille « comme il faut » pouvait-elle alors s’adonner à la masturbation ?
Cette époque semble lointaine, puisqu’aujourd’hui en Occident les femmes sont convaincues que leur corps leur appartient. Rares sont les femmes qui, aujourd’hui, pour des raisons d’ordre moral, renonceraient à la masturbation. Même s’il reste des progrès à faire, nous sommes parvenus à un niveau acceptable de tolérance sexuelle. Et la masturbation féminine a valeur de symbole dans cette évolution. Elle suppose que la femme n’a pas besoin de l’homme pour se procurer des orgasmes ! Une femme libre et indépendante sait se faire jouir toute seule.
Pour mettre fin aux idées reçues
Le porno reflète souvent les préjugés populaires. Il montre des filles répondant aux appétits sexuels masculins, normalise la sexualité, et fait subir aux femmes une pression culturelle. Une femme « normale » serait celle qui jouit lorsqu’un homme la pénètre. Les hommes, de leur côté, se rassurent en pensant que leur pénis est le pourvoyeur de plaisir idéal. Or, si l’on met de côté la relation amoureuse, les femmes n’ont besoin de personne pour jouir. Comme l’écrit Nancy Friday dans L’Empire des femmes, « la masturbation est un excellent moyen de séparer l’amour du sexe, surtout pour celles qui ont tendance à les confondre. »
Si une femme ressent l’envie d’être pénétrée, cela lui suffit-elle pour autant ? A moins qu’elle ignore son propre corps et ne s’identifie au désir de l’homme, elle ne peut généralement avoir un orgasme sans stimulation directe ou indirecte de tout le réseau clitoridien. Et pour cause : le vagin est un organe très peu innervé, donc peu sensible. Le plaisir ressenti par une femme lors d’une pénétration dépend entièrement du clitoris. Selon la sexologue Shere Hite, l’orgasme est toujours dû à la stimulation du clitoris.
La pénétration et le va-et-vient du pénis dans le vagin ne procurent qu’une excitation diffuse. Toutes les femmes vous le diront : un orgasme obtenu sans caresse directe sur le clitoris est beaucoup moins intense.
Le clitoris est l’exact équivalent du gland chez l’homme. La femme jouit grâce au clitoris et à son vaste réseau. C’est, véritablement, l’organe de la jouissance : il est entièrement et exclusivement dédié au plaisir. Freud l’avait déjà compris, sans en cerner entièrement les enjeux. Selon lui, la maturité sexuelle s’atteint, chez la femme, lorsqu’elle est capable de « s’adapter » au désir masculin, et donc jouir de la pénétration ! Une femme qui ne peut jouir sans stimulation du clitoris est donc sexuellement « immature ». Un malentendu que Freud aurait certainement dissipé, s’il avait vécu plus longtemps !
L’orgasme en solo : ce sont les femmes qui en parlent le mieux…
Les femmes que nous avons interrogées dans le cadre de ce dossier nous ont presque toutes avoué qu’elles obtenaient un orgasme plus fort grâce à la masturbation. Anne-Claire, journaliste parisienne de 34 ans, Cécile, comédienne de 40 ans basée à Lyon, et Naïma, commerciale nanterroise de 29 ans, ont accepté de débattre et d’échanger leurs expériences pour La Voix du X.
Anne-Claire nous a confié : « Bien sûr, quand je fais l’amour avec un homme, les orgasmes sont agréables parce qu’il y a une dimension affective, une chaleur unique. Mais les sensations sont diffuses, moins intenses. L’orgasme clitoridien est vif, précis, cinglant. Je n’arrive jamais à cette intensité lorsque mon partenaire me pénètre ».
Quand à Cécile, elle affirme douter de « l’existence de l’orgasme vaginal… Quand mon ami me baise, je lui demande de me caresser le clitoris et l’anus. Sentir son sexe dans mon vagin ne me suffit pas pour parvenir à l’orgasme. Pourtant, il est plutôt bien équipé ! Comme quoi, ça ne veut rien dire…»
Naïma : « Je me masturbe comme un mec, je pense. Je regarde souvent du porno. La plupart du temps, ce sont les mêmes séquences. Je ne m’en lasse pas. Je sais exactement ce qui va me faire jouir. J’ai un orgasme à tous les coups ! Parfois, quand j’ai le temps, la masturbation me permet d’obtenir trois, quatre, cinq orgasmes consécutifs… C’est le kiff total ! Avec mon mec, c’est impossible et donc plutôt frustrant… J’aime faire l’amour avec lui, mais surtout pour le besoin de me sentir prise, pénétrée. C’est plus psychologique. »
Il ne s’agit pas d’affirmer que les femmes préfèrent, dans leur grande majorité, le plaisir de la masturbation à ceux du coït. Chaque femme a ses préférences et la sexualité est subtile et personnelle. Mais, si l’on se réfère aux études de Masters et Johnson, les femmes qui se masturbent ont toutes des orgasmes plus forts que lors du coït. Pourquoi ?
– D’abord, une femme qui se masturbe seule peut se concentrer plus facilement sur ses sensations. Pour Naïma, « c’est un moment pour moi. Je ne pense qu’à ce que je ressens, j’ai appris à connaître mon corps par la masturbation, et je sais exactement où me caresser au bon moment. »
– La femme qui se caresse n’est pas déconcentrée par les mouvements du partenaire. « Quand mon partenaire sent qu’il est sur le point de jouir, poursuit Naïma, il accélère son mouvement et cela me déconcentre. Je suis obligée de me caresser si je veux jouir avec lui. »
Naïma nous a parlé de cette sensation que les femmes ressentent souvent : l’envie d’être pénétrée. Cette sensation de « vide vaginal » à combler peut être agréable ou pas, selon les femmes. L’introduction du pénis joue alors un rôle apaisant. Mais il « disperse » les sensations. L’idée selon laquelle il existe des femmes vaginales et d’autres clitoridiennes repose donc sur un malentendu. Selon de nombreuses féministes, l’orgasme vaginal serait une illusion, entretenue par les défenseurs d’une sexualité socialement acceptable et rassurante pour les hommes.
Une autre idée reçue consiste à affirmer que les femmes sont lentes à parvenir à l’orgasme. Or, le Rapport Hite nous apprend que 95% des femmes atteignent l’orgasme grâce à la masturbation, rapidement et sans effort. Elle leur permet également d’obtenir des orgasmes à répétition. Si une femme affirme qu’elle ne s’est jamais masturbée, cela veut simplement dire, dans la plupart des cas, qu’elle n’a jamais eu d’orgasme de sa vie !
La masturbation permet aux femmes de se connaître. « En apprenant nous-mêmes ce qui nous excite, écrit Nancy Friday dans L’Empire des Femmes, nous devenons plus aptes à l’orgasme, nous devenons de meilleures partenaires sexuelles, conscientes de leur rôle, capables de donner en retour du plaisir, mieux aptes à exprimer ce qui nous excite » Elle ajoute : « Si nous éprouvons de la répugnance à toucher ce qui est entre nos jambes, cette répulsion ne pourra que s’étendre, nous laissant à jamais insatisfaites de tout notre corps. »
Comment une femme qui ne saurait pas se faire jouir elle-même pourrait-elle guider son partenaire dans l’apprentissage de son corps ? Les femmes peuvent-elles compter sur les hommes pour leur apprendre les ressources de leur sexualité ? Assurément non, et les femmes savent aujourd’hui que le plaisir sexuel ne vient pas forcément d’une autre personne.
Travaux pratiques
Les femmes, en se masturbant, ont généralement recours au fantasme, un scénario qui soutient le désir. Il est toujours personnel et n’obéit qu’au seul principe de plaisir. Une femme ne doit pas avoir peur de ses fantasmes. Celui-ci n’a aucun rapport avec la vie réelle, il est donc inutile de se demander s’il faut le réaliser ou pas !
Comment ?
La femme doit également trouver la position qui lui convient le mieux. Selon l’enquête menée en 2012 sur 3 404 femmes par le psychiatre et sexologue Philippe Brenot, Les femmes, le sexe et l’amour (éd. Les Arènes), elles sont 73,8 % à se masturber par stimulation manuelle du clitoris.
La femme excite avec la main la zone clitoridienne, pratique avec un doigt des mouvements circulaires, ou du haut vers le bas. Elle peut aussi effleurer son clitoris, lui donner des petites tapes légères. Le plus important est de maintenir un rythme continu jusqu’à l’orgasme. Autre technique efficace : placer deux doigts de chaque côté du clitoris et faire vibrer : effet garanti ! Même si un doigt dans le vagin n’est pas nécessaire, cela peut être pratique pour humecter le clitoris à l’aide des liquides naturels.
Nos témoins, Anne-Claire, Cécile et Naïma nous ont décrit leurs positions préférées :
« En général, je me place sur le dos, les jambes écartées, explique Cécile. Je préfère être nue, mais parfois je garde ma culotte, ce qui est moins irritant. Je pense à des choses qui m’excitent. J’ai un livre sur les fantasmes féminins, que je prends à chaque fois avec moi. Je relis toujours les mêmes textes, cela m’aide à démarrer, puis j’invente des variantes. Je me caresse le clitoris par des mouvements circulaires. De l’autre main je caresse mes tétons, je les tire, les pince… À l’approche de l’orgasme, je tends mes fesses vers le haut. J’arrive toujours à jouir, parfois plusieurs fois de suite… »
Un sextoy peut constituer un moyen pratique et rapide pour « orgasmer ». Une femme n’a d’ailleurs pas besoin de faire pénétrer l’instrument dans son vagin : il suffit de le faire vibrer sur le clitoris pour jouir très rapidement ! Certaines femmes peuvent jouir ainsi en deux minutes à peine ! Elles seraient 23,3 %, selon l’enquête de Philippe Brenot, à « orgasmer » par stimulation clitoridienne avec un sextoy.
« Je commence toujours par caresser mon clitoris, explique Anne-Claire. J’aime bien mettre un doigt ou deux dans mon cul. Quand je suis bien excitée, je me sers de mon rabbit. Je l’introduis rarement dans mon vagin, je préfère le faire vibrer sur mon clitoris» Anne-Claire recommande «d’insérer le gode dans le vagin quand on sent l’orgasme arriver. Les muscles se contractent autour, c’est d’autant plus jouissif ! »
Naïma aime se masturber en se frottant à un coussin: « je me couche sur le ventre et je place un petit coussin sous mon pubis, explique-t-elle. Je frotte mon sexe, et j’appuie mon clitoris contre le coussin. Je fais des petits mouvements, d’avant en arrière, ou je me caresse les fesses à deux mains, en remuant le bassin de façon circulaire. Quand je sens l’orgasme arriver, j’accélère le rythme… c’est délicieux, et efficace : je jouis en quelques minutes. » Selon l’enquête de Brenot, cette méthode concerne 21 % des femmes.
Autre méthode agréable : la masturbation sous la douche. La pression de l’eau doit être réglée au maximum. La femme dirigera le jet sur son clitoris, et accompagnera cette stimulation de caresses sur les seins, les fesses, le vagin. Le gel douche facilite les mouvements des mains, la peau mouillée aiguise les perceptions tactiles…
Les techniques sont innombrables : certaines femmes aiment se regarder dans un miroir, certaines gardent leur culotte, se caressent au travers ou écartent le tissu, d’autres préfèrent être entièrement nues. La position des jambes est aussi importante. Certaines femmes les écartent largement, d’autres préfèrent garder les jambes serrées. Une technique très connue consiste à se masturber simplement en serrant les cuisses. Selon l’enquête de Philippe Brenot, elles sont ainsi 16,4 % à se masturber par contraction des muscles des jambes !
Pour les couples, il est très enrichissant de regarder l’autre se masturber. C’est d’ailleurs un fantasme répandu. Apprenez comment l’autre se donne du plaisir, et vous comprendrez comment lui en donner ! Jouez à placer votre main sur celle de votre partenaire, et suivez le mouvement. Puis, essayez de la remplacer, et de faire aussi bien qu’elle ! Masturbez-vous en couple, vos sensations pendant d’autres pratiques s’en trouveront décuplées.
Quatre questions à… Jane Hunt, auteur de Osez… la masturbation féminine (La Musardine).
La Voix du X : Comment expliquez-vous l’engouement de la presse pour la masturbation féminine ?
Oh, il n’y a pas que la presse, le monde médical en a fait aussi son cheval de bataille. Autrefois, se masturber était limite passible de la peine de mort (j’exagère mais dans certains pays, à peine), aujourd’hui c’est quasiment une obligation. On est passé d’un extrême à l’autre. La presse ne fait que relayer une opinion générale.
L’engouement pour les sextoys est-il toujours d’actualité ?
Oui, personnellement je ne suis pas une inconditionnelle, mais certains couples et de nombreuses femmes ont été littéralement « sauvés » par les sextoys ! Je pense qu’ils sont aussi de bons adjuvants à la masturbation manuelle, une précieuse économie d’énergie, et un gain en efficacité. Et puis, l’offre en sextoys ne cesse de s’agrandir et les machines sont de plus en plus perfectionnées.
Si vous deviez donner aux femmes trois bonnes raisons de se masturber…
1) Se faire plaisir « gratuitement », sans objectif de rendement ou de performance. Du plaisir « pour elles seules », en quelque sorte…
2) Faire un voyage en compagnie d’elles mêmes, repousser les frontières de leur sexualité.
3) Mieux se connaître, physiquement et mentalement.
As-tu reçu des retours de lectrices sur ton livre ?
Assez peu, j’en ai eu davantage sur Osez la chasse à l’homme. Peut-être est-ce parce que Osez la masturbation touche davantage à l’intime. J’ai eu des réactions comme celles-ci : « j’ai appris des trucs sur les autres femmes que je n’osais même pas imaginer » ou : « je croyais être la seule à faire comme ça, je me sens plus “normale”, maintenant ».
J’ai eu d’excellents retours des professionnels du sexe : sexologues, commerçants de sextoys, libraires érotiques, etc. Ils citent mon livre et le vendent très bien. C’est très valorisant pour moi (rires) !
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