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Réguler sa masturbation pour maîtriser son power ?
L’onanisme sous toutes ses formes, c’est le pied et on ne redira jamais assez les bénéfices qu’il y a à se soulager régulièrement. À contrario, les tenants de l’abstinence soutiennent que le combo branlette-porno plonge dans une léthargie like dont on a du mal à s’extraire. Le porn serait-il comme la viande ? Faut-il en consommer moins, mais mieux ? Réponses.
La branlette a son mois spécial depuis le milieu des années 90 : l’International Masturbation Month. Malheureusement, il est passé, c’était en mai. Heureusement, cela n’empêchera personne de se faire du bien. Ce genre de date symbolique sonne un peu bidon, les Américains ont toujours quelque chose dans leur sac pour justifier des opérations commerciales, mais c’est aussi une manière de marquer le coup et de rappeler que le combat continue. Car oui, il y a lutte, notamment depuis que Joycelyn Elders, Administratrice de la Santé Publique des USA a été virée par Bill Clinton en 1994 pour avoir déclarée lors d’une conférence des Nations Unies sur le Sida que « la masturbation est une pratique saine et sans risque. Il faudrait inclure son enseignement dans le cursus d’éducation sexuelle des élèves ».
De la morale à la quête de soi
Un quart de siècle plus tard, pas sûr que grand monde s’étonnerait qu’un ministre tienne de telles déclarations. On en a vu passer des bien pires depuis 18 mois… À l’époque, en pleine pandémie de VIH, le tollé provoqué par le statement de Joycelyn Elders avaient des fondements moraux. Enseigner l’onanisme, mais c’est l’encourager, mon dieu ! Désormais, les arguments contre la masturbation sont devenus moins ridicules et plus fins. Elle ne rend plus sourd, ne répond plus à un besoin malsain, mais serait un obstacle à l’épanouissement.
Alors que l’abstinence sexuelle désignait l’absence de rapport entre deux personnes, elle englobe désormais l’absence de rapport avec sa propre main. En résumé : éjaculer, ça ne sert à rien. Ça pique même de l’énergie, avec en toile de fond, l’image du geek affalé la bite à la main et abruti par les joints, a vécu... En effet, les nouveaux gourous de l’abstinence prônent le bien-être, la transmutation sexuelle, la méditation spirituelle et l’approfondissement des liens affectifs. Au soutien, les coachs de vie sur Youtube et les webzines, notamment féminins, qui en font des gros titres à renfort de témoignages anonymes.
Un article du Nouvel Obs, assez ancien puisqu’il date de 2016, se révèle toutefois plus intéressant que les autres. Il relate l’histoire de Patrick qui s’évertue à maîtriser ses pulsions, « à se détacher de la composante animale de son être et à augmenter son potentiel intellectuel ». Après des périodes d’abstinence allant jusqu’à 18 mois, voire 36 mois, Patrick n’est pas devenu un surhomme, mais son expérience est riche d’enseignements. Morceaux choisis : « J’avais à l’époque un besoin évident de repos et de me ressourcer. Je consommais des drogues et mon organisme était très éprouvé. Il est donc possible que ces conditions de santé aient influencé mon désir d’abstinence (…) J’ai préparé une course pendant neuf mois. L’abstinence me procurait une meilleure résistance dans certaines phases d’entraînement, mais au-delà de trois ou quatre semaines, mes performances diminuaient. Dans ces moments-là, le fait de stimuler mon système hormonal avec une production de spermatozoïdes apportait un regain de puissance physique. Parallèlement, ma volonté se renforçait. (…) J’ai maintenant une sexualité calculée de façon à garder un bon potentiel, sans les inconvénients d’une abstinence longue. À savoir : perte d’endurance physique, apathie et déphasage quasi-total par rapport au monde ».
En 2021, on n’attend pas Patrick. Les sciences sociales ont multiplié les analyses sur le sujet à la lumière de l’individualisation croissante de la société. Sur les réseaux, ils sont toujours plus nombreux à avouer s’accommoder, sinon profiter, d’une sexualité millimétrée, voire aussi rare que celle des pandas, masturbation incluse.
Les pouvoirs de l’orgasme
À l’opposé du spectre, il y a les gros branleurs et du point de vue médical, il n’y a toujours rien de mal à ça, sauf à devenir compulsif et à ne plus être maître de soi. « La masturbation est excellente pour la santé » assure le docteur londonien Larisa Corda, spécialiste des questions de fertilité. Elle affirme en outre que la vitalité n’a rien à voir avec le nombre d’éjaculations journalières ou hebdomadaires. « Une fréquence masturbatoire importante n’a pas d’impact significatif sur la fertilité. Le sperme plus ancien est automatiquement évacué et remplacé par de nouvelles cellules plus fortes. Traditionnellement, les données montrent que la qualité optimale du sperme se situent après deux à trois jours sans éjaculation. Mais d’autres recherches suggèrent que les hommes qui ont une bonne qualité de sperme maintiennent une concentration et une mobilité normales des spermatozoïdes, même avec une éjaculation journalière ». C’est dit. Conserver le système reproducteur actif quotidiennement pourrait améliorer la qualité du sperme produit. De plus, rien ne vient étayer l’hypothèse d’un regain de puissance induit par une longue abstinence. « La masturbation amène les niveaux de testostérone à augmenter. Après l’orgasme, ils reviennent simplement à la normale », appuie de son côté le docteur Rena Malik, urologue.
Pour enfoncer le clou, la masturbation et la jouissance ont des effets bénéfiques qui ont été mesurés. Dans son dernier ouvrage L’orgasme thérapeutique, quand le plaisir chasse la douleur (Ed. Grancher), le psychanalyste et sexothérapeute Alain Héril a analysé les résultats d’une enquête menée sur Facebook en février 2019 et pour laquelle 600 personnes se sont confiées. Meilleur sommeil, réduction du stress, des douleurs, stimulation du système immunitaire, évacuation des substances carcinogènes concentrées dans le sperme et favorisant le cancer de la prostate, voilà quelques-uns des bienfaits liés à l’orgasme, qu’il soit atteint seul, à deux ou en groupe.
Beaucoup des prétendus bénéfices de l’abstinence sont des légendes urbaines. De plus, derrière ceux qui la défendent se cachent encore et toujours des mouvements liberticides qui mènent une croisade contre le porn. Toutefois, chez certains, l’abstinence peut s’avérer un exercice d’autodiscipline salutaire. « Tout cela peut être apparenté à des satisfactions proches d’un régime alimentaire », conclut Patrick.
De notre côté, on ne cessera jamais de célébrer la générosité des plats en sauce…
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