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Sexe et religion : 10 choses que vous ne saviez (peut-être) pas !

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Les religions évoquent davantage l’oubli du corps et la répression du plaisir, plutôt qu’une sexualité libre et décomplexée. Pourtant, certaines traditions ont recommandé à l’homme les plaisirs de la chair, celle-ci devenant parfois un véhicule vers la transcendance.

1/ Des prostituées bonnes à marier…

Le sexe et le sacré, ça ne date pas d’hier. Au milieu du IIIe millénaire avant J.C., à Babylone, chaque femme devait, au moins une fois en sa vie, se rendre au temple de la déesse Ishtar, et s’offrir à tout étranger qui la désirait, en échange d’une somme d’argent déposée ensuite sur l’autel. L’historien Hérodote raconte que les plus belles femmes rentraient chez elles après cette initiation, mais les autres passaient parfois jusqu’à « deux ou trois ans » dans le temple avant d’accéder au statut de femme « bonne à marier » ! La prostitution sacrée se pratiquait aussi en Égypte, où elle était associée au dieu Amon. En Grèce, à Corinthe, le temple d’Aphrodite abritait près de mille prostituées ! Dans ce contexte sacré, la prostituée devenait, pendant l’acte sexuel, l’incarnation de la déesse.

Ishtar déesse de l’amour et de la sexualité

2/ Dans l’Antiquité, l’orgie, c’était sacré !

Dans la Grèce antique, la sexualité plurielle revêtait presque toujours un caractère sacré. Il s’agissait de fusionner avec ses semblables, la nature, et les dieux, jusqu’à perdre conscience de son identité. Les Grecs utilisaient deux mots pour exprimer cet état induit par l’orgie : enthousiasmos (enthousiasme), c’est-à-dire l’état de possession par un dieu, et ectasies (extase), état qui consiste à « sortir de soi ». L’extase était provoquée, au cours des fêtes religieuses, par la musique, l’alcool, la danse, la frénésie sexuelle, ou encore des substances hallucinogènes comme l’ergot de seigle (aux effets comparables au LSD). A Athènes, les mystères d’Éleusis, voués à la déesse Déméter, déesse de l’agriculture, étaient célébrés au printemps, en même temps que le culte orgiaque de Dionysos. Le dieu du vin et de la fertilité, fréquemment représenté ivre et efféminé, provoquait chez ses disciples une frénésie sexuelle incontrôlable.

Une orgie antique selon l’artiste français Paul Avril

3/ Dans le Moyen-âge chrétien, on savait rigoler !

Au Moyen-Âge, les fêtes dionysiaques de l’Antiquité ont réussi à s’intégrer dans des religions plus strictes, comme le christianisme. Des éléments des Saturnales romaines, caractérisées par des réjouissances immodérées et orgiaques, se sont parfaitement intégrés à la fête de Noël.

Tous les 11 janvier, au cours de la très populaire « fête des fous », officiellement condamnée par l’Eglise catholique, mais longtemps tolérée, les hommes et les femmes échangeaient leurs vêtements, se déguisaient en ménestrels, ou encore en animaux. On élisait ensuite un « pape des fous », qui devait célébrer une messe des ânes, pendant laquelle toute l’assistance braillait. Le clergé lui-même participait activement à la fête, en lançant du crottin sur les gens ou en chantant d’obscènes parodies de cantiques. De nombreux écrits témoignent de la licence sexuelle propre à cette fête. On s’en doutait un peu…

4/ Jouissif, le taoïsme ? Oui, mais pas question d’éjaculer !

Selon le Taoïsme, courant mystique très ancien de la pensée chinoise, l’énergie yang de l’homme est comme le feu – volatile et rapidement dépensée – tandis que l’énergie yin de la femme est comparable à l’eau de l’océan, inépuisable. Les guides taoïstes recommandent à l’homme d’absorber l’énergie yin d’autant de femmes que possible, en les menant à l’orgasme, sans pour autant perdre leur yang en émettant du sperme. Les hommes doivent absolument retenir leur éjaculation, sous peine d’une dangereuse perte de vitalité. Jusqu’à vingt ans, on conseille un maximum de deux éjaculations par jour. Jusqu’à trente ans, dépasser deux éjaculations est dangereux. Jusqu’à soixante-dix ans, une éjaculation par mois est amplement suffisante ! Cette technique du coitus reservatus, adoptée par le tantra, procure à l’homme la vigueur nécessaire pour honorer plusieurs femmes en une seule nuit.

5/ L’hindouisme : ascèse et sensualité

L’hindouisme considère l’ascétisme et le désir comme deux formes d’énergie interchangeables. Shiva, l’un des trois dieux majeurs de l’hindouisme, est un ascète retenant toujours sa semence, et dont le phallus est constamment en érection. Il copule continuellement pour engendrer l’univers. Le linga (phallus), incarnation de Shiva, est certainement la chose la plus vénérée en Inde.

Sous le règne du souverain musulman moghol Aurangzeb, au 17e siècle, deux cents temples contenant des images de personnages nus dans des postures explicites furent détruits. Ensuite, c’est le puritanisme de l’Angleterre victorienne, adopté massivement par les classes éduquées et pratiqué bien après la décolonisation, qui contribua à détruire ces traditions.

6/ Le bouddhisme : une philosophie du renoncement

Le bouddhisme cherche à échapper aux tentations sexuelles, afin de ne pas multiplier les réincarnations dans des corps de chair. Selon le Vinaya Pikata, qui régit la vie des moines bouddhistes, mieux vaut pour le lingam (phallus) d’être dévoré par un serpent que de pénétrer dans le yoni (vulve) d’une femme. Cependant, au cours des siècles, les moines se sont demandés si la pratique de la sexualité pouvait vraiment saboter leur vie spirituelle. Padmasambhava, le fondateur du bouddhisme tibétain, au 8e siècle, eut plusieurs épouses, et le bouddhisme tantrique contribua à l’augmentation du nombre de maîtres laïcs mariés. Mais le célibat reste, encore aujourd’hui, la norme pour tous les moines ordonnés.

7/ Le tantra, ou la sexualité cosmique

Selon le tantra bouddhiste, le samskara (cycle des réincarnations) est identique au nirvana (le dépassement de la souffrance). Autrement dit, ce n’est pas en renonçant au monde que l’on peut atteindre l’éveil !

Toutes les écoles tantriques insistent sur l’idée d’une sexualité cosmique. Tout ce qui existe dans le monde est engendré par la déesse Sakhti, pénétrée par le dieu Shiva. Si l’univers est né du désir, les tantrikas hindous ne réfrènent pas le leur, mais essaient d’atteindre graduellement les plus hauts niveaux de réalisation, jusqu’à l’identification complète à la déité, primordiale et bisexuée.

Ce mouvement fut une révolution sur le plan philosophique. De nombreux pratiquants étaient issus des plus basses castes, et étaient incités à briser les tabous. Les pratiques tantriques étaient parfois choquantes, mais il fallait se démarquer au maximum de l’ordre établi. Si les ascètes hindous reniaient le monde afin de se concentrer sur l’immortel, les tantrikas, eux, rejetaient les conventions afin de mieux se concentrer sur le monde.

8/ Le judaïsme : sexe et devoir

Le judaïsme contient dans ses origines d’anciens cultes phalliques. Ainsi, les rochers de forme phallique et les colonnes étaient sacrés, et Moïse exerça sa magie avec une verge transformée en serpent. Un élément phallique a survécu dans le judaïsme moderne : la circoncision, signifiant l’alliance entre l’homme et dieu. Cette coutume a également été interprétée comme un sacrifice humain symbolique. Selon les textes, c’est le serpent phallique qui initie les humains à la sexualité.

Selon la tradition juive, on devrait jouir du sexe dans les liens du mariage. Avant le Sabbat, faire l’amour est même un devoir sacré. Cependant, la tradition juive réprime sévèrement les pratiques sexuelles qui ne débouchent pas sur la procréation. Les enfants doivent naître dans le mariage et leur paternité doit être sûre. Dans le Lévitique, la condamnation à mort est préconisée pour l’homosexualité. Les Écritures enseignent des règles de pudeur et d’hygiène. Des coutumes accompagnent les menstruations : une femme doit s’abstenir de rapports sexuels pendant ces périodes, et doit, au bout de quatorze jours, se purifier par un bain rituel.

9/ L’islam : érotisme et interdits

L’islam mélange, à propos de la sexualité, différents éléments judaïques, chrétiens et arabes. Mahomet déclara que « l’on devait se réjouir du monde entier, mais que la meilleure chose du monde était une femme excellente ». Le prophète refusa le monachisme pour l’islam, et condamna le célibat, à condition bien sûr de respecter l’abstinence rituelle pendant les heures diurnes du ramadan et pendant le pèlerinage à la Mecque. La sexualité est encouragée par le Coran, tant qu’elle n’est pas incompatible avec la piété.

Certains versets décrivent les délices érotiques qui attendent les hommes au paradis. Ils y sont accueillis par des houris, jeunes filles aux yeux vifs et aux seins plantureux, « amoureuses et d’âge égal ». Les poètes arabes ont toujours loué la beauté, ainsi que la quête de l’aimé, « qui vient comme un voleur dans la maison la nuit ». Le moins que l’on puisse dire, c’est que certaines traditions ont beaucoup excité l’imagination des Occidentaux, comme le harem (mot dérivé de l’arabe haram, qui renvoie au sacré et à l’interdit).

L’historien Malek Chebel soutient que, selon certains textes, l’amour divin passe par l’amour charnel. Quand on questionnait le prophète sur ce qu’il avait aimé dans ce monde, il répondait : « les femmes, le parfum et la prière ». N’avait-il pas, d’ailleurs, neuf femmes dans son harem ? Selon un hadith, « en se mariant, l’homme accomplit la moitié de la religion ». L’inégalité entre les sexes ne se retrouve d’ailleurs pas dans l’islam des origines. Le Coran a même inventé le droit au plaisir pour les femmes, treize siècles avant les féministes ! Voilà une approche dont certains ne veulent pas entendre parler. Comme l’écrit l’islamologue Abdelwahab Bouhdiba dans La Sexualité en Islam : « La sexualité ouverte, accomplie dans la joie en vue de la réalisation de l’être, a peu à peu cédé la place à une sexualité close, morose et comprimée. »

La piscine du harem, par Jean-Léon Gérôme

10/ Christianisme : ne jetez pas la pierre… à la femme adultère !

Le christianisme s’est nourri de diverses influences, absorbant d’autres traditions, comme la gnose ou le manichéisme, pour lesquelles la chair est fondamentalement mauvaise, la femme ayant été créée par le démon.

Si le christianisme a produit des myriades d’ascètes militants, c’est probablement de la faute de Saint Paul, qui s’était fixé pour but de présenter « l’assemblée des fidèles au Christ comme une chaste vierge. »

C’est encore Saint Paul qui introduisit dans le christianisme le dogme de l’eucharistie, dérivée des agapes romaines, ou fêtes de l’amour, repas au cours desquels on oubliait les différences de sexe et où hommes et femmes se gratifiaient mutuellement d’un baiser de paix, avant de participer à une orgie collective… La messe du dimanche, aujourd’hui, est un peu moins festive !

Dans les Évangiles, Jésus se montre particulièrement compatissant envers Marie Madeleine et la femme adultère, faisant preuve d’une ouverture d’esprit rare chez les juifs de l’époque. Jésus, né d’une vierge, aurait pu mépriser les femmes faisant commerce de leur corps. Et pourtant, n’a-t-il pas dit : « les publicains et les prostituées arrivent avant vous [les pharisiens qui observent scrupuleusement la Loi] au Royaume de Dieu » (Matthieu, 21, 31) ? La prostituée, pécheresse absolue, peut, si elle se repend, faire partie des élus. C’est d’ailleurs à Marie Madeleine que Jésus, ressuscité, apparaît en premier. Marie Madeleine et Jésus : l’union ultime du sexe et du sacré.

Source : Le sexe et le sacré, Clifford Bishop, éd Albin Michel.

Pierre Des Esseintes est auteur et journaliste, spécialisé dans les questions de sexualité. De formation philosophique, il est également sexologue. Il a publié, aux éditions La Musardine, Osez la bisexualité, Osez le libertinage et Osez l’infidélité. Il est aussi l’auteur, aux éditions First, de Faire l’amour à un homme et 150 secrets pour rendre un homme fou de plaisir.

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