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Philippe Brenot, auteur de l’Éloge de la masturbation : « le porno a un côté pédagogique indéniable ! »
Le psychiatre et anthropologue Philippe Brenot nous a présenté la nouvelle édition de son Éloge de la masturbation. Il y explique le rôle fondamental de cette pratique dans la connaissance de soi, dans la construction de la sexualité, notamment pour les femmes et son importance pour le couple…
Cet éloge de la masturbation, c’est une réédition ?
C’est plutôt une nouvelle édition. J’ai écrit l’Éloge de la masturbation en 1997, il y a plus de 25 ans ! À l’époque, les réactions des gens ont été surprenantes. On connait le rôle fondamental de la masturbation, comme élément central de la sexualité. J’avais écrit ce livre pour les femmes. Or, le message n’est pas du tout passé. En 1997, le mot masturbation ne pouvait pas être entendu par les femmes. À l’époque, les filles se « caressaient », et les mecs se branlaient. Tout a changé au début des années 2000, avec la démocratisation des sextoys. On a commencé, à l’époque, à parler du clitoris.
Ce fut une redécouverte de cet organe ?
L’existence du clitoris n’a jamais été passé sous silence, comme on a pu le raconter ! L’anatomie du clitoris est connue depuis 1570 ! On a fait croire que la médecine était sexiste, parce que dans les manuels de médecine, il y a une demi-page sur le clitoris. La raison en est simple : ce n’est pas un objet de la médecine. Il n’existe aucune pathologie du clitoris.
Au début des années 2000, on a donc commencé à parler très explicitement de masturbation féminine…
Oui, la masturbation féminine était le dernier tabou de la sexualité en Occident. Or, on n’a jamais vraiment expliqué pourquoi c’était important. Selon le rapport INSERM/INED de Nathalie Bajos et Michel Bozon en 2008, la masturbation concerne 90 % des hommes et 60 % des femmes, contre 70 % et 40 % en 1992. Vous me direz : c’est inimaginable que 40 % des femmes ne se masturbent pas ! En fait, la question posée était biaisée. Elle était formulée ainsi : « vous êtes-vous déjà touchée une fois au cours de votre vie ? ». 90 % des hommes se sont beaucoup touchés, très souvent, et pendant longtemps. Pour un garçon, ce sexe qui bouge va facilement être manipulé pour apporter du plaisir. Pour une fille, l’accès aux zones érogènes est plus compliqué. En plus, dans les sociétés restrictives par rapport à la sexualité, il est facile de casser la sexualité d’une fille. Il suffit de taper sur la main en disant : « touche pas, c’est sale ! ». C’est comme cela que de nombreuses filles n’auront jamais de sexualité. Si les hommes, dans leur grande majorité, ont une sexualité qui fonctionne bien, au moins jusqu’à trente ans, c’est parce qu’ils se sont beaucoup touchés. La masturbation va permettre au système vasculaire de se développer, au réflexe érectile de s’installer. Les hommes ont une expérience d’eux-mêmes grâce à la masturbation. Chez les femmes, il y a une grande part de constructions psychosociales, qui vont jouer sur les constructions physiologiques.
Pourquoi la masturbation a-t-elle été condamnée à certaines époques, au 17ᵉ siècle, par exemple ?
La masturbation a été interdite au 17ᵉ siècle par les protestants. C’est un mouvement qui part des luthériens en Hollande, passe par les anglicans, pour arriver aux calvinistes avec Tissot [médecin suisse, très célèbre pour ses ouvrages consacrés aux méfaits de la masturbation]… Rousseau lui-même disait à Tissot qu’il cautionnait sa position sur la masturbation, lui qui était un branleur fini !
C’est à ce moment-là qu’on a commencé à appeler la masturbation « onanisme »…
Oui, Onan a été tué par Dieu parce qu’il a commis une faute. Nommer la masturbation onanisme, c’était un bon moyen de l’interdire ! Alors qu’en fait, dans la Bible, il s’agit d’un coït interrompu, et pas du tout d’une masturbation !
Vous expliquez que l’interdiction de la masturbation pour les femmes a eu des effets dévastateurs sur leur sexualité…
Oui, car la répétition des cycles sexuels chez l’adolescente va construire peu à peu la zone génitale, la rendant érogène. En 2011, j’ai mené une grande étude sur 2500 hommes et 3400 femmes. J’ai demandé aux femmes à quel âge elles avaient commencé la masturbation. Je me suis rendu compte que sur les 3400 femmes, 40 avaient des orgasmes extraordinaires. Ces 40 femmes, qui ont eu leur premier orgasme à 10-11 ans (l’âge moyen du premier orgasme pour les filles est 14 ans), se sont beaucoup touchées, de façon très précoce, pendant longtemps. Ce sont des femmes qui ont « construit » leur région génitale. Toutes les femmes qui consultent pour des difficultés d’accès à la jouissance ont très peu, ou pas du tout, d’expérience de la masturbation. Avec une femme de trente ans qui ne s’est jamais masturbée, on peut travailler sur le lâcher prise psychothérapeutique, on n’arrivera à rien, parce que les vaisseaux sanguins n’ont pas poussé ! Toutes les difficultés féminines viennent de là. C’est le message essentiel de Masters et Johnson. Ils nous l’ont appris par leurs expérimentations.
Quel est l’écrivain qui a le mieux parlé de la masturbation ?
J’ai consacré toute une partie de mon livre à la masturbation dans la littérature. Moi, j’aime beaucoup ce qu’écrit Proust. Il a eu des amants, mais très peu finalement. Il raconte très joliment, dans les premières pages de Du côté de chez Swann : « je montais sangloter tout en haut de la maison, à côté de la salle d’étude […] Destinée à un usage plus spécial et plus vulgaire, cette pièce […] servit longtemps de refuge pour moi, sans doute parce qu’elle était la seule qu’il me fût permis de fermer à clef, à toutes celles de mes occupations qui réclamaient une inviolable solitude : la lecture, la rêverie, les larmes et la volupté ». Il y a aussi un très beau passage de Céline, dans Guerre, dans lequel il décrit les masturbations que pratiquaient les infirmières dans les lits des poilus.
J’ai découvert grâce à votre livre que l’inventeur du mot masturbation était Montaigne !
Oui, Montaigne forme le mot masturbation avec les mots latins manus, la main, et stupratio, l’action de souiller. Mais le mot peut aussi venir de mastropeuein, prostitution. À l’époque, le mot prostitution désignait beaucoup de choses ! Oui, c’est bien Montaigne qui construit ce mot, en parlant de Diogène, qui se masturbait en public.
Longtemps, la masturbation a été considérée comme une maladie, une souillure… Pourquoi ?
La persécution de la masturbation est un complot médico-religieux. Ça vient de la découverte du spermatozoïde. En 1604, aux Pays-Bas, Jansen invente le microscope. Non pas pour les savants, mais pour les marchands, qui veulent s’assurer de la pureté des étoffes. Leeuwenhoek, un drapier hollandais, a découvert le spermatozoïde en 1677, certainement en regardant son propre sperme à la suite d’une masturbation. Leeuwenhoek a voulu faire partager sa découverte à la Royal Society de Londres, mais là-bas, personne ne l’a écouté ! Les savants londoniens n’avaient que faire d’un drapier ! Un siècle plus tard, en 1772, un biologiste hollandais, Hartsoeker, est subjugué par le nombre de spermatozoïdes dans une goutte de sperme ! Il se demande si les testicules d’Adam ne contenaient pas l’ensemble de l’humanité à venir. Et peut-être que chaque homme porte en lui, dans ses testicules, l’ensemble de l’humanité. La masturbation serait donc une sorte de génocide !
Aujourd’hui, la découverte de la sexualité, et de la masturbation, se fait avec le porno. Est-ce une bonne chose, selon vous ?
Le porno est le premier élément d’éducation à la sexualité. Même si ça peut en effrayer certains, je dirais que le porno a un côté pédagogique indéniable ! Bien sûr, le porno peut être traumatisant pour des esprits fragiles, mais il est intéressant de constater, aujourd’hui, le développement d’un esprit critique. Selon de récentes études, tous les ados ont bien conscience que le porno, ce n’est pas la vraie sexualité. Les gens de ma génération n’ont pas commencé la sexualité avec les prostituées. Mais à l’époque de nos arrière-grands-parents, les femmes restaient vierges jusqu’au mariage et pour les garçons, l’apprentissage de la sexualité se faisait avec des prostituées. C’était une initiation. Les garçons en parlaient entre eux. Le service militaire était une initiation, en partie parce qu’il y avait du sexe. Or, on sait que du point de vue anthropologique, nos sociétés sont fragiles parce qu’elles manquent d’initiations. Le porno en est sûrement une. Souvent, les ados regardent du porno entre copains, et les filles sont maintenant conviées. C’est un phénomène assez récent. C’est intéressant, parce qu’ils vont échanger, avoir une approche critique. Je ne suis pas du tout pessimiste par rapport à ça.
Philippe Brenot, Eloge de la masturbation – Pour une sexualité libre, éd. La Musardine, coll. L’Attrape-Corps, 146 p., 15 €.
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