Bio/Milieu du X
Entretien avec Antoine Lebel de French Twinks : celui qui voulait faire bouger les lignes du porno gay français
Originaire de Suisse, Antoine Lebel, qui vit désormais principalement à Nice, est à la tête du jeune label porno gay minets qui monte : French Twinks. En à peine 2 ans, ce jeune réalisateur et producteur est parvenu à hisser sa production à un beau niveau de notoriété. Il tourne désormais régulièrement aux États-Unis, en collaboration avec des labels comme Helix Studios, squatte de plus en plus les blogs américains spécialisés. Et ce n’est que le début… Grand entretien avec le web entrepreneur qui bouscule les codes et les habitudes du porno gay français.
Comment as-tu commencé à faire du porno ?
J’ai arrêté l’école à 17 ans, avant le BAC, pour créer ma boîte sur Internet. J’ai commencé à travailler sur le web en 2000. Mon activité consistait à créer des sites, optimiser leur référencement… L’un de mes clients a un jour eu l’envie de créer un sexshop en ligne et j’ai eu l’occasion de participer à cette aventure. Le site a bien marché, on a fini par s’associer et de 2003 à 2012, je ne me suis plus consacré qu’à ce projet. C’est ce qui m’a permis de mettre un premier pied dans l’industrie adulte, de côtoyer pas mal de gens du x hétéro.
Fin 2012, après avoir vendu la boîte et avoir terminé mon contrat de directeur, j’ai décidé de faire autre chose. Étant gay, aimant le web et ayant des connexions dans le x business, j’ai eu envie de créer un projet porno original. J’ai trouvé un réalisateur aux États-Unis et on a lancé la web série porno gay Friends & Buddies. On a tourné ça en Floride, c’était un mélange de scènes de cul et de sitcom. A ce stade, je n’avais encore jamais tenu de caméra. J’officiais comme producteur, j’écrivais les histoires, je participais aux castings…
Au bout du compte, ça a été un petit succès même si c’était très compliqué de gérer tout ça entre la France et les Etats-Unis. Ca m’a en tout cas donné envie de continuer mais avec un autre projet où je pourrais davantage contrôler les choses. C’est comme ça qu’a fini par naître le studio French Twinks.
Pourquoi avoir choisi de faire du porno minet ? C’était un fantasme personnel ?
Pas spécialement un fantasme. J’ai 33 ans, je me sens encore assez proche des modèles, je suis à l’aise face à eux. Ce serait moins le cas face à des daddies. Je filme ce que je connais et ce qui me plait. Par exemple, je n’ai pour l’instant pas fait de vidéos sur le fétichisme du pied car ce n’est pas mon délire et je ne suis pas certain d’arriver à bien filmer ce trip.
Si j’ai choisi ce registre, c’est aussi parce que, comme dans bien d’autres domaines, la jeunesse a toujours fait vendre. Il y aura toujours un intérêt pour les jeunes mecs.
Peux-tu revenir sur les débuts du label ?
J’ai lancé French Twinks avec mon binôme, Jérôme, qui est hétéro. On s’était rencontrés pour Friends & Buddies sur lequel il avait travaillé comme monteur. Lui avait une formation d’école de cinéma mais moi j’ai vraiment appris à filmer sur le tas. J’ai tourné ma première scène en tant que réalisateur en juin 2013. C’était une scène avec Theo Ford, qui tournait lui aussi sa toute première scène mais en tant que modèle. C’était pour mon premier projet pour le site, un porno-réalité intitulé Apprentis Pornstars. Je n’étais pas trop stressé à ce moment-là. Le plus difficile, ça a plutôt été de tout mettre en route, l’aspect logistique : trouver les mecs, trouver les lieux, demander aux gens de me faire confiance alors que je débutais, que je n’avais pas encore de studio existant ou de crédibilité.
J’avais envie d’apporter quelque chose de nouveau et cela passait par le fait de filmer de nouveaux visages, des débutants. Pour y arriver, j’ai cherché pendant des semaines des mecs dans tout Paris, sur des sites de rencontres… Au final, je garde un très bon souvenir de ces débuts : on a tous commencé en même temps. Apprentis Pornstars était notre école.
Comment qualifierais-tu ta façon de tourner ?
Au départ, j’ai beaucoup fonctionné à l’instinct. J’ai l’impression, en regardant le travail accompli entre mes premières et mes dernières scènes, qu’il y a eu une certaine évolution. Pas seulement dans la réalisation mais également dans la façon de travailler avec les modèles et de les diriger. Aujourd’hui, quand je filme, je sais exactement ce que je veux comme plan et comme image et je fais ce qu’il faut pour les obtenir. Quand j’ai commencé, j’avais du mal à oser diriger. C’est quand même une position très particulière que celle d’un réalisateur porno. Tu te retrouves à donner tout un tas d’indications aux garçons et quand tu débutes ça peut paraître bizarre ou gênant de dire à un garçon que tu connais à peine : « écarte bien les jambes, mets ta bite comme ça… ». et de les voir s’exécuter. Maintenant je suis beaucoup plus à l’aise dans ce rôle.
Selon toi, qu’est-ce qui te différencie des autres labels ?
French Twinks met en avant de vrais minets imberbes, à l’air un brin innocent et pas des mecs qui jouent les jeunes. Nos twinks ont en général 18-23 ans et on fait également des mélanges avec des acteurs un peu plus âgés et plus virils des « hunk ». On a aussi l’argument Made in France aux yeux des étrangers. On est le pays de l’amour, du sexe, du french kiss, des mecs pas circoncis…
Pour l’aspect visuel, on tient absolument à ce que ça paraisse bon enfant, coloré. On est, je l’espère, à mille lieux de certaines productions glauques comme on peut en voir en provenance de l’Europe de l’Est. Les décharges publiques ou les toilettes, très peu pour nous ! Un blog porno américain nous a désigné une fois comme du Porno Disney et c’est quelque chose qui me va tout à fait. Et en même temps, même si on est plus édulcoré que les autres en apparence, ça ne nous empêche pas d’explorer des trips plus hard comme le bukkake ou le fist.
Là où notre regard est différent, c’est qu’on tient toujours à mettre en valeur nos modèles. On veille à ce que ça reste beau, propre. On fait attention à ne pas être insultant vis à vis des garçons dans les textes des vidéos. On fait des photos sur lesquelles ils sont recouverts de sperme mais où ils sourient. C’est important pour moi de montrer qu’on s’amuse, que les mecs sont à l’aise et que même s’ils bossent, ils réalisent des fantasmes et il y a de la complicité. A mes yeux, ce n’est pas parce qu’on se prend une éjac sur la gueule que l’on est une salope ou que l’on doit se sentir humilié.
Dans ma démarche de montrer du sexe positif, je ne fais pas non plus de bareback. Je n’ai pas envie d’encourager la prise de risques. On a beau dire que les mecs passent des tests, au moment du résultat cela renvoie à 3 ou 4 semaines auparavant. Rien ne garantit qu’il n’y a pas eu d’incident depuis. Ce n’est pas fiable. Je n’ai pas envie de lancer mes modèles là-dedans.
Comment décrirais-tu l’ambiance sur ton plateau ?
Il y règne une bonne ambiance. Parfois un peu trop même : il arrive qu’on ait l’impression d’être au milieu d’une cour de récré et dans ces moments-là je suis obligé de jouer au proviseur (rires). Il y a aussi une belle entraide entre les acteurs : ceux qui ont déjà tourné mettent généralement les nouveaux à l’aise.
Prends-tu du plaisir quand tu tournes ? Ressens-tu de l’excitation ?
Je m’amuse à travers le côté créatif. J’aime le côté bricole, monter des petites histoires avec une équipe et les moyens du bord. Je suis content quand je trouve qu’une scène est réussie et qu’elle excitera le client. Je trouve ça amusant aussi de chercher en permanence de nouvelles façons de filmer le sexe, de tenter de nouvelles positions.
Pour ce qui est de l’excitation, si j’ai dû être excité 10 minutes en 2 ans lors d’un tournage, c’est le maximum ! Il n’y a rien d’excitant à tenir une caméra et à superviser une scène. C’est du travail, il faut être concentré sur son image, veiller que le son soit bon, que l’action se déroule comme prévu et ne rien manquer…
Combien de temps dure le tournage d’une scène ?
Quand tout se passe bien 3h30-4h, avec la séance photo incluse. Parfois cela peut prendre jusqu’à 6 heures.
Vous n’êtes que deux pour faire tenir le site. Ce n’est pas trop crevant ?
C’est beaucoup de boulot, oui. Je fais des journées d’au moins 10 à 12h, 6 jours par semaine, sans parler des périodes de préparation et de tournage. Je réalise, je produis, je fais la programmation du site, les textes, l’encodage des vidéos, les jaquettes des dvd, le social media… Les gens n’imaginent souvent pas la charge de travail qu’il y a derrière tout ça. Il faut être un touche à tout.
French Twinks se démarque des autres productions gays françaises par sa façon de communiquer, proche de celle des labels américains…
Je pense qu’aujourd’hui c’est primordial d’exister sur les réseaux sociaux, dans la presse, sur les blogs. Je viens du web et de la communication quand la plupart des autres labels français ont été fondés par des anciens acteurs, pour la plupart d’une autre génération, qui n’ont pas tous su, comme c’est le cas dans d’autres secteurs, gérer la transition vers Internet. Chez French Twinks on prend la communication et le social media très à cœur.
En tant que label spécialisé dans les minets gays, tu te retrouves à faire tourner des garçons parfois très jeunes. N’est-ce pas trop compliqué, à la fois pour toi mais aussi pour eux qui ne mesurent peut-être pas totalement ce qu’ils sont en train de faire ?
Il est vrai que beaucoup de garçons qui tournent pour le label arrivent pour leur première scène en étant parfois très inexpérimentés. Clairement, certains, malgré le nombre de partenaires qu’ils revendiquent, ne savent pas baiser. Du coup, ils apprennent sur le plateau. C’est là où la direction d’acteurs s’avère importante quand il s’agit d’évoquer l’art de sucer (rires). Ce que j’ai pu remarquer, c’est que beaucoup bloquent particulièrement sur les préliminaires, sur le soft, la sensualité. Pas mal de jeunes mecs sont habitués aux plans culs directs et ne savent pas comment s’y prendre, n’ont aucune notion de complicité, d’échange. En tournant pour nous, ils découvrent en quelque sorte une autre façon d’explorer la sexualité et cela rend les scènes très naturelles.
Avant de faire tourner un modèle, je lui rappelle bien à quoi il s’expose, que ses scènes seront diffusées, potentiellement vues par des proches, qu’il doit être sûr de son choix. Souvent, les garçons ont envie de tourner vite, ne prennent pas le temps de lire leur contrat alors j’insiste pour qu’ils lisent bien tout. C’est là où la façon de gérer le casting est très important. Aucun des acteurs qui a tourné pour moi ne m’a demandé de retirer l’une de ses scènes. J’ai l’impression que la nouvelle génération de jeunes est beaucoup plus à l’aise avec la sexualité et la nudité. Ils ont l’habitude avec les réseaux sociaux de se mettre en scène, y compris dans leur intimité à travers Snapchat par exemple. Moi à leur âge jamais je n’aurais envoyé une photo de moi à poil !
Je suis de plus en plus vigilant avec les modèles que je caste. Pour moi, il faut qu’ils soient vraiment sûrs de ce qu’ils font, déterminés. Ceux qui ont des hésitations dès le départ sont ceux qui finissent par te planter le jour du tournage.
Qu’est-ce qui selon toi attire un jeune mec de 18 ans à faire du porno ?
Tout d’abord il y a le fantasme que représente le porno en soi, une recherche de plaisir personnel. Il y a aussi un côté challenge pour beaucoup. Pas mal de garçons cherchent à vaincre une timidité ou un complexe en étant filmés. Et bien sûr l’aspect financier est aussi déterminant : tourner permet d’arrondir ses fins de mois.
On propose qui plus est aux acteurs une véritable expérience. On tourne une fois par mois, pendant 4-5 jours, et on vit tous ensemble dans « la maison French Twinks ». C’est plus sympa que de venir seulement un après-midi pour un tournage, faire sa scène et repartir tout seul…
As-tu l’impression qu’ils rêvent de notoriété, d’une carrière américaine ?
Ils sont en général assez réalistes. Certains ne viennent que pour tourner une ou deux vidéos, vivent leur expérience et ne reviennent plus jamais. D’autres se révèlent très à l’aise, dans leur élément, et on peut alors entamer une collaboration sur une plus longue durée. Il y a aussi ceux qui auraient aimé tourner davantage mais que je ne sollicite plus car je ne les ait pas trouvés à la hauteur. Modèle porno, ça reste une performance, un métier. Il faut pouvoir bander sur commande, jouir sur commande, tenir plusieurs heures. Ca n’est pas donné à tout le monde.
Moi j’aimerais bien contribuer à créer de nouvelles porn stars. Mais avec des modèles jeunes, c’est assez compliqué. Ils changent vite d’avis, peuvent arrêter du jour au lendemain s’ils rencontrent un mec ou trouvent un boulot. Avec les moyens dont je dispose, je ne peux pas leur proposer un salaire donc c’est difficile de les « garder ». J’essaie en revanche de leur proposer des choses intéressantes comme les amener à tourner aux États-Unis avec des stars des studios Helix notamment, 15 jours, tous frais payés, avec un bon cachet…
Penses-tu qu’aujourd’hui il soit possible de monter sa production porno gay en France sans chercher à s’exporter à l’étranger ?
Tout dépend de l’ambition qu’on a. Il y a des producteurs indépendants qui font ça juste pour avoir un peu d’argent en plus ou un petit salaire. Je pense que c’est possible de s’en sortir en France à condition toutefois de réellement s’y investir, d’y consacrer beaucoup de temps et d’avoir des fonds pour commencer. Il faut du temps pour rentabiliser une vidéo, c’est impossible de lancer un site sans avoir une bonne trésorerie. Il n’est pas impossible de se retrouver avec une vidéo qui ne rapporte que 60 euros au bout de plusieurs semaines. Les gens pensent que tout le monde est riche dans le porno mais c’est faux ! Très peu de personnes gagnent leur vie avec le porno gay en France. Je vais être honnête, je n’ai pas de soucis à aborder cette question. Personnellement, au bout de 2 ans, French Twinks atteint tout juste le seuil de viabilité.
Pour ceux qui comme moi sont pris d’une envie de créer une véritable entreprise, une marque, c’est quasi-impossible d’aller loin sans vouloir toucher le marché américain. 65 % des clients de French Twinks sont étrangers.
La tendance aujourd’hui est au regroupement. Les sites pornos appartiennent à de grands groupes qui gèrent 10-15 labels à la fois. Personnellement, j’ai rapidement opté pour la collaboration plutôt que la concurrence avec les autres sites américains. Ainsi j’ai contacté au culot des labels comme Helix ou Dominic Ford pour monter des scènes franco-américaines et ça a bien marché.
Penses-tu que l’arrivée des casques de réalité virtuelle comme l’Oculus Rift vont révolutionner le marché ?
C’est trop tôt pour le dire. Il faut déjà voir si les foyers l’adoptent, si ça se démocratise. Si c’est le cas, et si cela est viable par rapport aux coûts de production, je serais ravi de m’y mettre. Mais j’attends de voir. La 3D n’a finalement pas changé grand chose. Aujourd’hui, alors que l’on tourne désormais tous en HD, la majorité des consommateurs regardent du porno sur leur téléphone portable…
Je suppose que comme tout label tu es confronté au piratage…
Oui, nos vidéos sont régulièrement piratées. Mais je paie un service qui me permet d’effacer les contenus pirates environ 48h après. Le système n’est pas infaillible mais cela me permet de ne pas voir tout mon catalogue dispo en ligne illégalement.
De plus en plus de labels font désormais de la pub ou mettent leur bande-annonce sur les mêmes tubes qui piratent leur contenu…
Je diffuse certaines bandes-annonces sur des tubes indépendants. Ce qu’il faut savoir, c’est que la plupart des tubes appartiennent à des grands groupes pornos. C’est vraiment eux qui brassent tout l’argent. Aujourd’hui c’est devenu difficile de faire la promotion du x. On ne peut pas faire de sponsorisation sur Twitter ou Facebook. On ne peut pas annoncer sur Google. Donc on finit par acheter de la pub sur les mêmes tubes qui essaient nous voler notre contenu. Le producteur est devenu le paysan du porno. C’est le diffuseur qui se fait le plus d’argent.
Comment envisages-tu l’avenir pour French Twinks ?
Je vais continuer à développer mes partenariats à l’étranger. Je veux aussi développer la marque. Proposer de nouvelles formes de contenu, aller vers l’érotique… J’ai envie de me différencier, me donner de nouveaux objectifs. C’est un métier qui peut être répétitif donc c’est important de ne pas rester sur ses acquis. A terme, j’aimerais bien pouvoir élargir mon équipe, faire travailler d’autres réalisateurs, être capable de déléguer.
J’ai connu un premier succès avec un sexshop en ligne car on était là au moment où les sex toys, qui étaient jusqu’alors considérés comme glauques, sont devenus plus ludiques, plus colorés. C’est ce que j’essaie de faire aujourd’hui avec le porno : proposer un bel emballage, un produit fun et sexy.
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