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Petit précis des pseudonymes porno

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Oubliez donc ce mythe du nom du clébard et de la rue où vous habitiez. C’est absurde, voyons ; il y aurait statistiquement beaucoup plus de Kiki De Gaulle en circulation dans le X-business français (remarquez que ça a de la gueule comme pseudo). Non, c’est du sérieux. On parle business, là ! Choisir son alias est une étape cruciale dans une carrière de hardeur. C’est le nom par lequel on sera désigné pour le reste de son parcours dans le X (voire le reste de sa vie) sur les plateaux, sur Internet, dans la rue, qu’on le veuille ou non. Demandez donc à Ian Scott, qui a changé son pseudo en 2013 pour celui de Yannick Shaft, et que tout le monde appelle toujours Ian Scott. Aussi, on ne choisit pas son nom de scène pornographique comme on opte pour une marque de lessive au supermarché. L’exercice répond à un certain nombre de règles. Pour vous aiguiller, voici donc un petit précis des usages en cours dans le X actuel.

Tout simplement

En premier lieu, gardons à l’esprit qu’il ne s’agit pas d’un pseudonyme du même acabit que ceux dont on affuble nos avatars virtuels sur World Of Warcraft. Ce n’est pas un simple nom folklorique, c’est une marque. Rocco Siffredi, Anissa Kate, Abella Danger ; il faut que ça sonne. Pour ce faire, il y a plusieurs écoles : les assonances et autres allitérations, pour les Bac L option poésie ; les calembours, pour les plus blagueurs ; ma préférence allant évidemment à la fameuse technique « Stan Lee », avec dédoublement de l’initiale (Peter Parker, Bruce Banner, Asa Akira, Mia Malkova, Riley Reid). 

Dani Daniels, faisant la promotion d’un flacon d’épices Dani Daniels, dans un chemisier Dani Daniels #daniception

Mais il ne faut pas oublier la règle essentielle : faire simple. Et faire simple, ça veut bien souvent dire faire court. Cinq syllabes maximum, nom et prénom compris. « Hercule Savinien Cyrano de Bergerac », c’est certes très joli, mais à l’heure du porno sur Internet, personne ne sera foutu de l’épeler proprement sur une barre de recherche avec une main dans le slip. Si vous êtes malgré tout inconditionnel de l’œuvre d’Edmond Rostand, pourquoi ne pas opter pour l’élégant « Roxx Ann » ? C’est évocateur, percutant et même unisexe, avec un petit peu d’audace.

Ma référence à moi

Ce qui nous amène à la question de l’inspiration. Un peu comme le tatouage, le meilleur moyen de ne pas regretter un alias, c’est encore de puiser dans une référence fondatrice et intemporelle. Ici, si chacun fait un peu à sa sauce, on peut quand même repérer quelques grands archétypes. Tout d’abord, et aussi étonnant que ça puisse paraître, l’une des toutes premières sources de surnoms coquins, c’est le prénom du copain ou de la copine d’enfance. Aaron Wilcoxxx, Lauren Phillips, Julie Holly ; on ne compte plus hardeurs qui ont emprunté le patronyme de leur ancien partenaire de bac à sable, qui est sans doute ravi, voire un peu jaloux, qu’on s’essaie à la double pénétration en son nom.

Mais pourquoi se contenter copier un nom stylé quand on peut en emprunter un stylé et déjà célèbre, donc évocateur d’un certain prestige auprès du public ? Là, tout y passe ; feu James Dean, Isabelle Adjani ou encore Monica Bellucci, comme beaucoup d’autres comédiens et comédiennes de renom, disposent ainsi de leur alter-ego pornographique. Les millenials étant passés par là, les références diverses à la pop-culture sont elles aussi de plus en plus présentes, entre Leya Falcon, qui ne cache pas son amour pour une certaine saga intergalactique (celui qui dit « Star Trek » prend une claque) ; Kimmy Granger, dont la chevelure généreuse et le minois de Sainte-Nitouche nous évoque inévitablement une célèbre sorcière adolescente ; ou encore April O’Neil qui a carrément piqué le nom de la copine des tortues ninja.

L’héroïne de mon enfance…

Enfin, il reste les fondamentaux. Guerlain, Lacroix, Gaultier, Jacobs, Chanel, Dior, les enseignes de haute couture ont toujours eu la côte auprès des dames du X, qui se rêvent sans doute en chefs d’œuvres inaccessibles d’une collection de luxe, aux lignes dessinées par un styliste légendaire. Et puisque c’est d’actualité, laissez-moi proposer un petit « Kayla Gerfeld » aux débutantes qui souhaiteraient s’ériger en création ultime de l’homme à l’éventail.

Voyage, Voyage

Si nos petites Françaises sont si friandes de cette dernière astuce, c’est que les grands noms de la mode invitent au voyage. Plus précisément, ils évoquent Paris, capitale du chic, du luxe et du glamour. Choisir un pseudo, c’est aussi décrire en quelques lettres une identité, réelle ou fantasmée, qui transporte le spectateur à la simple évocation de l’héroïne de ses plaisirs solitaires. Et évidemment, dans cet univers où le fétichisme ethnique tient une place prépondérante, suggérer des origines étrangères par un nom de scène au petit goût d’ailleurs est particulièrement prisé ; au risque de verser dans les clichés. Consonances latines pour les belles brunes à la peau mate (Angelina, Gina, Valentina), prénoms américains pour les jolies blondes (Britney, Cynthia, Kimberley), sonorités japonaises pour les Asiatiques. Il n’y a guère que les belles Slaves qui ne s’embarrassent pas d’usurpation, mais c’est un peu facile. Il n’y là-bas que des Katja, des Ania, des Elena, et pas du tout de Mireille Dupont.

True Colors

Sasha Grey, Tori Black, Rose Valérie, Bailey Blue ; est-ce vraiment nécessaire d’aller aussi loin quand une simple couleur suffit à créer un nom de scène qui claque ? Au fond, il n’y a pas besoin d’aller chercher l’inspiration en haut des montagnes pour accoucher de deux noms qui sonnent bien ensemble. Tout bon marketeux vous le dira, la symbolique la plus évidente est souvent la plus efficace. Et la langue de Shakespeare regorge de termes concis pour se confectionner une seconde identité sur mesures, façon super-héros. Couleurs (Rose, Violet, Black, White, Scarlet, Red, Amber…), symboles (Heart, Star,…), concepts (Love, Vice, Sin,…), animaux… Ouvrez n’importe quel dico junior en langue anglaise pour trouver votre bonheur. Plutôt brunette, gothique, piercing et tatouage ? Pif,  « Scarlet Sin » ! Plutôt teen, pastel et chamallow ? Paf, « Foxy Bubble » ! Plutôt nature, spiritualité et transcendance ? Pouf, « Sylvia Rain » !

D’Evan Stone à Lexxington Steele, en passant par Erik Everhard, ces messieurs préféreront quant à eux les épithètes glorifiant la raideur de leur vigoureuse masculinité.

Cette iconographie tendance « livre d’images de cabinet d’orthophoniste » n’est cependant pas du goût de tout le monde. Aussi, il reste une dernière option plutôt élégante pour les pornstars en devenir les moins inspirées ; une option popularisée par la cultissime Clara Morgane elle-même. Eh oui ! Qu’est-ce qui est plus sensuel et féminin qu’un prénom de jeune demoiselle peu farouche ? Deux prénoms de jeune demoiselle peu farouche accolés l’un à l’autre, pardi ! Sophia Laure, Mya Lorenn, Gia Paige ou Eva Angelina vous en convaincront. À choisir, préférez toutefois « Liz Lara » à « Francine Huguette »…

Clara, Morgane, deux prénoms pour une icône

Voilà pour ce petit tour d’horizon des blases de pornostars, qui soulève finalement une impérieuse question : Pourquoi toute cette gymnastique ? Pourquoi ne pas performer sous son vrai nom de baptême ? Certains évoqueront très justement les risques de harcèlement inhérents au X-business, mais au fond, la vraie raison est autre. Hardeur est le seul métier à offrir la possibilité de faire vivre publiquement le super-héros sans peur, sans tabou et sans reproche qui vit dans la tête de chacun. Ce serait franchement trop bête de s’en priver, non ?

Titulaire d'une maîtrise en cinéma, auteur d'une Porn Study à l'Université Paris VII Diderot, Clint B. est aujourd'hui chroniqueur de l'actualité porno.

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