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[Brève #137] P*rno en ligne : vers le blocage de Twitter
Après une demi-douzaine de sites pornographiques, c’est au tour de Twitter de faire les frais d’une dénonciation auprès de l’Arcom pour diffusion de matériel pornographique. Bloquera ou bloquera pas ?
Depuis la promulgation, en 2020, de la loi destinée à protéger les mineurs des l’exposition à la pornographie, une poignée de sites pornographiques ont été sommés de se mettre en conformité, c’est-à-dire de proposer un outil de vérification d’âge robuste empêchant toute personne mineure d’accéder au site en question. Galvanisés par cette indiscutable victoire morale sur le stupre et la licence, les associations de protection de l’enfance et autres groupuscules catho tradi anti-travail du sexe se sont donc mobilisés pour demander la tête de n’importe quelle plateforme numérique montrant de la fesse, à commencer évidemment par Twitter, impénitent pourvoyeur de séquences explicites aux dizaines de millions de visites quotidiennes. Sortez le pop-corn, le combat de pouces entre le l’Arcom, ex-CSA plus impuissant et démuni que jamais, et Twitter, troisième réseau social le plus fréquenté au monde, s’apprête à débuter. Spectacle garanti.
#SaferTwitter for kids
C’est qu’en s’attaquant à l’oiseau bleu, les mercenaires de la protection de l’enfance, 53 associations plus ou moins obscures spécialisées dans l’extorsion de subvention au nom de la panique morale pédo-satanique, réunies sous l’étendard de la Cofrade (Conseil français pour l’association des droits de l’enfant), rêvent d’un coup d’éclat : mettre au pas les réseaux sociaux. Et pour ce faire, ils ont même un slogan : #SaferTwitter for Kids, rendre Twitter sûr pour les gamins, dans une conception toute personnelle de la protection des enfants, où les kids pourraient naviguer en toute liberté entre les influenceurs en dropshipping, les brouteurs à la petite semaine et les Youtubeurs problématiques, mais sans risquer d’apercevoir un téton au détour d’une page.
Sauf que leur délire absurde d’un Internet censuré pour les mômes, bien aidé par une loi inepte et inapplicable, pourrait bien mettre les autorités dans l’embarras. Car tant qu’il s’agissait mettre la pression à des sites de cul avec des exigences impossibles à satisfaire, l’Arcom avait les coudées franches. Il ne se trouvait personne pour défendre les vilains petits canards. Mais dorénavant contrainte d’engager une procédure contre l’un des réseaux sociaux les plus massifs du monde, l’autorité de régulation risque fort de mettre à jour toute l’inefficacité du nouveau dispositif légal contre le porno.
*Breaking*. Les associations de protection de l'enfance réclament de l'Arcom la suspension d'accès à Twitter, en raison de la présence de contenus pornos susceptibles d'être vus par un mineur. https://t.co/JrJyASZoxr
— marc rees (@reesmarc) August 29, 2022
L'autorité est saisie aujourd'hui.
Dura lex sed lex
Il n’y a, en outre, que très peu d’issues possibles. Libre à chacun de sélectionner la plus plausible.
Option 1 : Twitter se couche devant la puissance légale de l’Arcom et de la justice française. Il renonce alors à la diffusion de contenu explicite. Il bannit à tour de bras les comptes jugés pornographiques, et ouvre la porte à un tollé médiatique concernant sa censure arbitraire.
Option 2 : Twitter se couche, et met en place un système de vérification d’âge spécialement adressé à la France, qui en plus remplirait miraculeusement tous les critères de protection des données privées requis par la CNIL et l’Arcom. Il n’y aurait a priori plus besoin de censurer le réseau. Mais accepterait-il de se séparer de sa base adolescente ?
Option 3 : Twitter tient son cap et engage le bras de fer devant la justice. Au terme d’une procédure de plusieurs mois, le réseau est finalement bloqué sur le territoire français, déréférencé sur Google, effacé des téléphones, banni de l’AppStore et autres Google Play. C’est une première pour la France qui rejoint le club très fermé des régimes tout à fait démocratiques bloquant l’accès à un réseau social.
Option 4 : Twitter tient son cap et engage le bras de fer avec la justice. Au terme d’une procédure de plusieurs mois, le réseau démontre qu’il n’existe pas de solution de vérification d’âge viable et respectueuse des données personnelles, qu’en outre il est hébergeur et qu’au-delà d’un rôle de modération des contenu illicites, il n’a pas vocation à censurer les contenus certes porno mais légaux proposés par ses utilisateurs. La justice prend acte et l’Arcom est renvoyée à son impuissance.
Premiers éléments de réponse le 6 septembre prochain, quand le tribunal judiciaire de Paris rendra son verdict concernant les premières assignations en justice de Pornhub, Xhamster, Tukif, Xnxx et Xvideos. À n’en pas douter, le cas Twitter sera jugé à l’aune de ces délibérés.
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