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Magalie Guerrier Benoit, sexologue : « Chez certaines femmes, le pénis représente toujours quelque chose de dangereux. »

Vous travaillez sur un trouble sexuel peu connu, la phobie de la pénétration…
Dans ce livre, j’ai voulu distinguer les phobies de pénétration liées à la douleur comme le vaginisme, la peur de la pénétration anale et les dyspareunies d’une part, et la peur du pénis d’autre part. Dans le cas de la peur du pénis, les femmes envisagent la pénétration comme quelque chose d’ultra dommageable pour elles.
Vous en avez rencontré beaucoup ?
Oui ! Je précise que je travaille dans un centre de procréation médicalement assistée. Les femmes que je rencontre ne sont pas de celles qui vont consulter un sexologue. C’est souvent le désir d’enfant qui amène ces rencontres-là. Or, ces femmes n’arrivent pas à aboutir à des rapports sexuels. On pose souvent le diagnostic de vaginisme, mais il ne s’agit pas du tout de cela, dans la plupart des cas.
Quelle est la prévalence de ces troubles ? Existe-t-il des études sur la question ?
Non, et d’ailleurs, à chaque fois qu’il est question de phobies de pénétration dans une étude, on parle en fait de vaginisme.
La phobie de la pénétration est-elle liée à une peur des hommes ?
Non, les femmes que je rencontre sont souvent en couple, puisqu’elles viennent consulter pour une PMA. Pour se présenter en PMA, il faut normalement avoir une vie sexuelle de couple depuis un an. Or, je rencontre des femmes vivant en couple depuis plusieurs années et qui n’ont jamais consommé leur relation. Elles sont toujours vierges !
Pour quelles raisons ?
Il y a un poids très important de la religion, quelle qu’elle soit, en lien avec cette phobie. La représentation de la sexualité est toujours sacrée, ou dangereuse.
Une religion est-elle particulièrement représentée ?
Non, j’ai reçu en consultation des femmes juives, musulmanes, catholiques… À chaque fois, la pression religieuse était énorme.
Dans ce service de PMA, vous intervenez en tant que sexologue ?
Au départ, je voulais organiser un groupe de parole pour les femmes en parcours de PMA. Je me suis rendue compte que de nombreuses femmes souffraient de troubles sexuels. Elles veulent avoir des enfants mais ne savent pas comment ça se passe, elles ne connaissent pas leur génitalité, elles n’arrivent pas à mentaliser comment se passe une reproduction. J’ai vraiment été étonnée de l’écart qui existe entre cette demande d’enfanter, et les connaissances au niveau du corps, de la sexualité. C’est devenu mon moteur dans mes recherches.
Cela veut donc dire que les compagnons de ces femmes n’ont pas de sexualité non plus… ou alors, pas avec elles !
Dans mon livre, j’explique que j’ai constitué des groupes de parole exclusivement féminins. J’exclue donc les hommes des recherches. Mais ils ont forcément une sexualité. D’une manière ou d’une autre.
Quelles sont les causes principales de cette phobie du pénis ?
La méconnaissance du corps. Je dirais aussi le patriarcat. J’en parle aussi dans mon livre, pour expliquer le contrôle des hommes sur le corps des femmes, par l’intermédiaire de la religion, des parents (des mères surtout). Cela cause des dommages psychiques et physiques terribles.
Ces femmes n’ont pas d’amies à qui parler de leurs problèmes ?
C’est tabou. Ces femmes vivent dans un cadre rigide de représentations sociales. Dire que l’on a un problème sexuel, ce n’est pas très compréhensible pour les autres. Les amies sont plutôt dans le discours : « ça fait deux ans que tu es mariée, quand est-ce que tu fais un enfant ? ». C’est juste une suite logique. Quand elles disent que ce n’est pas possible, l’entourage ne peut pas l’entendre. La procréation est obligatoire ! C’est pour cela qu’elles sont en PMA. Elles cherchent des subterfuges pour détourner cette sexualité et procréer quand même.
Vous évoquez les traditions religieuses et leur influence sur la sexualité. Avez-vous l’impression que cette influence grandit aujourd’hui ?
Je ne sais pas si elle grandit. Je n’ai pas l’impression que cela empire, mais plutôt que ça a toujours été comme ça. On y prêtait moins attention.
Les femmes souffrant de cette phobie sont toujours dans la religion ?
Oui, elles subissent la pression de la religion, même si elles-mêmes ne pratiquent pas.
Ces femmes ont-elles reçu une éducation ?
Oui, parfois, j’ai été étonnée de constater que des femmes éduquées, qui exercent des postes à responsabilité, n’ont jamais regardé leur vulve. Elles évoluent dans leur vie, tout en ignorant cette partie d’elles.
Et les femmes qui se préservent pour le mariage, ça existe encore ?
Venez travailler avec moi, vous allez être étonné ! Cela concerne des femmes de toutes origines !
Vous évoquiez tout à l’heure le patriarcat. Essayez-vous de faire prendre conscience à ces femmes de l’oppression qu’elles subissent ?
Non, surtout pas. J’ai des maris qui viennent me remercier au cabinet quand leurs femmes parviennent à consentir à un rapport sexuel, ou à obtenir une grossesse spontanée. Je n’aimerais pas devoir subir des hommes qui viendraient me voir… mais pas pour me remercier ! Je n’essaie pas de changer les choses, je traite uniquement les symptômes.
Vous n’avez jamais reçu de menaces ?
Quand j’ai sorti mon livre Je squirte donc je suis, j’ai fait une interview pour Konbini qui a fait plus d’un million de vues, et dans les commentaires de la vidéo, des hommes ont écrit que je méritais la peine de mort ! Ça ne m’a pas impressionnée plus que ça, je sais comment ça se passe dans l’univers des réseaux sociaux, c’est le lieu où les gens déversent leur haine. Dans mon cabinet, je n’ai pas reçu de menaces, mais j’ai quand même subi des comportements agressifs. Un jour, un homme est venu avec sa femme, en séance, et l’a poussée vers moi, en disant : « aidez-là à changer, c’est elle qui a un problème ! »
Le sous-titre de votre livre est : « Des peurs pas si irrationnelles que ça ! » Qu’est-ce que cela veut dire ?
La phobie se définit comme une peur irrationnelle et irraisonnée. Quand on a peur du pénis, c’est évidemment irrationnel. Un pénis, ça ne tue pas ! Il s’agit de donner un sens à la phobie, et de tenter de l’expliquer.
Ces phobies se soignent-elles ?
Je traite 100 % des phobies. Je fais de la sexopédagogie. J’utilise des planches anatomiques, des découpes sagittales utérus/vagin en 3D, des vulves en silicone… J’ai des dilatateurs que j’utilise comme des verges en érection. J’apprends aux femmes à connaître leur corps. Ça marche toujours.
Ces femmes ont quand même leurs règles, elles sentent bien que quelque chose se passe à ce niveau-là…
Dans certaines cultures, les règles sont considérées comme quelque chose d’impur, de sale. C’est encore quelque chose qu’il ne faut pas aller explorer. Chez les juifs par exemple, une femme qui a ses règles, et pendant les sept jours qui suivent, ne peut pas toucher son mari.
Ces femmes n’arrivent pas à accueillir cela comme quelque chose de sain, de normal. Mais quand je leur explique comment fonctionnent les règles, c’est magique !
Vous ne touchez jamais le corps de vos patientes ?
Non, mais je leur donne comme tâche de se toucher elles-mêmes.
Recevrez-vous en consultation des femmes victimes de viol ?
Oui, j’en ai. Je parle dans le livre du cas d’une de mes patientes, qui a subi un viol de la part de l’homme qu’elle a dû épouser. À cause de la pression culturelle et familiale, on a considéré que c’était son premier rapport sexuel. Elle a dû épouser son agresseur. Chez certaines femmes, comme elle, le pénis représente toujours quelque chose de dangereux.
La Voix du X est un site consacré à l’actualité du porno. Pour vous, la pornographie peut-elle être un outil pour aider ces femmes ?
Pour la phobie de la pénétration du pénis, j’utilise beaucoup de scènes de pornographie « éthique », pour aider les femmes qui ont des troubles du désir de l’excitation, ou de l’orgasme.
Qu’appelez-vous pornographie éthique ?
Ce que fait Erika Lust, par exemple, c’est un très bon outil. Dans la pornographie mainstream, la pénétration est beaucoup trop visible. Quand on n’est pas à l’aise avec sa sexualité, ça peut être difficile à regarder.
Vous évoquiez tout à l’heure votre livre sur les femmes fontaines, Je squirte donc je suis…
Oui, j’ai repris les études des docteurs Salama et Desvaux (à retrouver sur ce sujet), mais j’ai voulu ajouter, dans mes recherches, ma propre expérience, et toute la dimension psychologique et émotionnelle de ce phénomène. Décrire le squirt quand on est un homme, même médecin, je trouve que c’est compliqué.
Magalie Guerrier Benoit, Phobies de pénétration, éditions de l’éveil, 112 p., 17 €.
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