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Bio/Milieu du X

[Réponse] Dans le porno, les festivals et les palmarès ne veulent rien dire !

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« Dans le porno, les festivals et les palmarès ne veulent rien dire ». Affirmation quelque peu gratuite à mon sens mais il faut bien un titre. Et pour illustrer ce propos, un exemple concret, la cérémonie des Hot d’Or 2009. A lire ce qui est écrit, on pourrait effectivement penser que c’est vrai. Comme je n’y étais pas je vais considérer que c’est vrai, même si j’ai de sérieux doutes.

Mais je voudrais apporter un gros bémol quand même à tout ce qui est dit. Voire même un très gros bémol.
Il me semble dans un premier temps un peu restrictif de résumer les festivals et palmarès à un seul cas en France, en oubliant les dix premiers qui se sont passés à Cannes. Mais j’y reviendrai plus tard.
Petite parenthèse : Penseriez-vous honnête et crédible de prendre un mauvais film joué par un acteur connu pour dire que toute la carrière de cet acteur est ratée ? Probablement pas et vous auriez raison. Cela ne vous viendrait peut-être même pas à l’idée. C’est pourtant ce qui est fait dans cet article… fermez la parenthèse !
Si je viens répondre / commenter, c’est parce qu’il me semble qu’en 10 cérémonies à Cannes, les Hot d’Or ont prouvé autre chose que le triste constat qui en est fait.

Remontons un peu le temps pour aller en 1992 quand tout commence…

Le magazine Hot Vidéo, l’officiel de la vidéo X lance les Hot d’Or à Cannes pendant le festival du cinéma. Et c’est pendant, pas juste après comme il est dit dans l’article. L’objectif de cette cérémonie ? Offrir une exposition médiatique à une industrie qui était décriée, méprisée et rejetée. Déjeuner de presse le mardi, remise des prix le mercredi soir, séances photos et interviews des gagnants le jeudi, pendant 3 jours le X business, comme on disait à l’époque, brille sur la croisette. Les actrices des films X sont les nouvelles starlettes de la croisette et la presse est ravie d’une telle aubaine.
Des producteurs, des acteurs, des actrices découvrent la médiatisation, sur le bout des pieds au départ pour certains qui finiront par y prendre goût.
Dans son fonctionnement, le magazine qui proposait reportages et interviews sur le X business toute l’année, publiait deux mois avant les Hot d’Or la liste des nominés établie par la rédaction de Hot. Un bulletin était inséré dans le magazine que les lecteurs envoyaient directement, à partir de la 3e année, à un huissier pour garantir le résultat
Évidemment les gagnants étaient contents et les perdants, pensant qu’ils étaient supérieurs, étaient très mécontents. Ça c’est la vie !
Mais même si c’était imparfait et si cela permettait aux producteurs de vendre quelque cassettes en plus, à quoi servaient les Hot d’Or ?

Aucune actrice, aucun acteur n’a pu faire monter son cachet après avoir reçu la statuette. Aucun réalisateur n’a obtenu de plus gros budgets.
Non le seul objectif était de faire reconnaître une industrie. Et ce rêve un peu fou, voire même mégalo, d’un homme a réussi, du moins pendant quelques années.
Sans les Hot d’Or, pas certain que l’on ait vu autant de producteurs, de réalisateurs et surtout d’actrices êtres les invités d’émissions de télé grand public. Avant les Hot d’Or, les actrices étaient des « pov’ filles » quand ce n’était pas juste des « P… irrespectueuses ». Les producteurs, les acteurs étaient des pervers, des détraqués.
Avec les Hot d’Or et l’expression « star du X » martelée par le magazine, les actrices sont devenues respectables, fréquentables. Elles envahissent les plateaux télé. Personne n’est dupe, les actrices font montrer l’audimat et le public est ravi de les voir.
Certes, parfois on aurait préféré moins les voir jouer les potiches ou être l’objet des moqueries de la part des animateurs. Mais elles étaient là. Capables de parler de sexualité, de liberté et certaines, peut être plus habiles que d’autres, ont pu faire une carrière après, tout en conservant leur pseudonyme de l’époque.
Mais les Hot d’Or n’existent plus, le star système a disparu et du coup, qui sont les stars du X aujourd’hui en France ? A supposer que l’expression ait encore un sens. Je n’en vois plus du tout dans les émissions de télé. Ni même de téléréalité.
Alors peut-être que la cérémonie de 2009 n’était pas parfaite, mais ne se souvenir que de cela pour dénigrer tous les festivals et palmarès c’est faire l’impasse sur des années de travail et de défense d’une industrie. Et quand, comme moi, on a défendu ce business pendant près de 14 ans, c’est un peu dur à avaler.

Et c’est un autre défaut de l’article, les festivals et palmarès valent quelque chose, ils valent la reconnaissance de tous ceux qui y participent et assument d’y participer. Et les gagnants sont comme des porte-parole de toute l’industrie.
Je sais bien que certains n’ont jamais apprécié cette médiatisation, voulant rester dans l’ombre pour faire leurs petites affaires entre eux, payer au black les acteurs et les actrices, ne pas payer de charges sociales, ne pas exister aux yeux de la loi pour tourner sur un canapé une scène pourave et en profiter pour se taper l’actrice en passant. Souvent les même qui se cachaient et critiquaient les Hot d’Or parce qu’ils ne gagnaient pas. Comme cet ancien acteur de l’époque du porno en 35mm qui dénigrait à la moindre occasion une cérémonie où il n’allait pas, reprochait de ne pas avoir de prix d’honneur pour sa carrière, en affirmant en même temps que jamais oh grand jamais il ne monterait sur scène pour le recevoir.
Je ne dirai qu’un mot sur les attaques adressées à ceux qui gagnent de l’argent. L’article est publié en France où l’on sait très bien que gagner de l’argent, c’est mal. Dans le même temps on reproche au magazine de favoriser ceux qui paient mais on reproche aussi au magazine de ne rien donner à d’autres qui paient aussi. Vive le collectivisme et l’uniformité. Mais les Hot d’Or, c’est pas l’école des fans (pour ceux qui ont connu). C’est comme la vie, il y a des gagnants et des perdants. Bref, on fait des reproches au magazine… Et c’est d’autant plus facile qu’aujourd’hui son fondateur n’est plus là pour répondre.

A ce propos, quand il est écrit que l’image gratifiante rejaillit sur les organisateurs, franchement le magazine aurait bien aimé que ce soit vrai. Mais autant la marque Hot d’Or s’est imposée dans les médias, autant la marque Hot Vidéo n’a pas reçu la même notoriété et si vous retrouviez les coupures de presse de l’époque, rares sont les mentions de organisateurs de la cérémonie. Pensez-vous vraiment que Franck Vardon, l’organisateur des Hot d’Or, ait tiré une quelconque gloire ou un quelconque avantage de la cérémonie ?
Au fait « Venus » à Berlin, qui sont les gens qui profitent de cette image ? Le seul malin dans l’histoire a été le magazine américain AVN qui a mis son nom dans le prix. Oui mais AVN est un magazine professionnel envoyé gratuitement aux vidéoclubs, financé par la pub et n’est pas destiné au grand public Il n’a pas besoin de gloire, il est l’organe officiel de toute l’industrie
L’article conclut en évoquant la possibilité ou la nécessité de « revenir à un système juste et égalitaire… » La belle naïveté que voilà. Croyez-moi on en a rêvé à une époque. Cela aurait donné une force supplémentaire et une crédibilité à la cérémonie.

Et je vais vous dire ce qu’il faut pour que ça marche :

1°) Réunir au moins 10 personnalités indépendantes, crédibles des médias, du cinéma, des sexologues ou qui vous voulez, mais qui vont accepter de venir défendre le porno et la cérémonie devant les médias. Parce que 10 inconnus ou second couteaux ne serviront à rien et n’empêcheront pas les critiques.
2°) Demander à ces mêmes 10 personnes de mater une centaine de films porno, sans préjugés et de l’assumer au moment de la publication des résultats.
3°) Être certains que ces personnes, parce qu’il s’agit de porno donc de quelque chose finalement de pas si important, ne se laisseront pas influencer par des lobbies. Qu’ils n’iront pas au plus facile, pensant « Dorcel et Jacquie et Michel sont les plus connus en France en 2015, alors donnons-leur les prix et débarrassons-nous de cette galère où nous n’aurions jamais dû aller ».

Déjà, quand vous aurez rempli ces trois conditions vous aurez fait un grand pas.
Permettez-moi de vous souhaiter bon courage dans votre recherche. Et beaucoup de patience au moment des critiques. Parce qu’il y en aura quand même.
Et si vous pensez que les résultats des festivals, qu’ils s’appellent Cannes, 7 d’Or, Molière, Oscar, MTV Awards ou prix littéraires, en France ou ailleurs sont totalement neutres, ne subissent aucune influence des gros producteurs, de la pensée unique, de la géopolitique, ni même de l’économie, c’est que, et pardonnez-moi pour la violence de mon propos, vous vivez dans le monde des bisounours.
Autre point dans l’article, chère Cécile Saint Laurent, vous attaquez les « AVN Awards » de Las Vegas, (comme je regrette de ne plus y aller) et les « Venus » de Berlin (c’est vrai je regrette moins). Peut-être avez-vous raison et qu’ils ne sont pas parfaits. Mais ils existent toujours. Et une des raisons de leur longévité est peut-être qu’aux États-Unis ou en Allemagne, même s’il y a des voix discordantes et des personnes qui critiquent, toute l’industrie a compris qu’elle avait intérêt à soutenir ces cérémonies, souvent liées à des salons. Salons qui drainent par ailleurs des dizaines de milliers de visiteurs chaque année et permettent de prendre le pouls de l’industrie. Certainement parce que même si les sociétés américaines ou allemandes sont en concurrence, elles travaillent toutes dans le même esprit, le même sens et ne refusent pas de se rencontrer ni de discuter ensemble, ni même de voir des concurrents arriver sur le marcher. Ne serait ce que pour continuer à exister. Un dialogue qui a toujours été impossible en France où chacun ne pensait que pour lui et on en voit le résultat aujourd’hui.
Vous dites que Dorcel « achète des kilotonnes de pub afin de s’assurer d’être toujours présent au palmarès ». Vous pensez qu’il le fait pourquoi dans un pays étranger ? Pour le plaisir de dépenser de l’argent, pour le plaisir d’avoir une statuette plus ou moins belle ? Peut-être parce qu’en Allemagne où à ma connaissance il n’y a pas de magazine d’information du porno en kiosque, c’est le seul moyen de faire sa pub et d’exister donc de vendre dans les vidéoclubs. La marque Dorcel n’est pas présente dans une trentaine de pays par hasard. Et à propos de Dorcel, quand il est écrit « la guéguerre de longue date entre Hot Vidéo et Dorcel a par exemple toujours empêché ce dernier de vouloir y participer, » c’est oublier un peu vite qu’à Cannes il a pratiquement toujours été présent et pratiquement toujours gagnant avec toutes les critiques que cela provoquait.

Au final, ce que vous faites dans l’article et c’est cela qui me dérange le plus, c’est de retirer le sens réel d’une cérémonie consacrée au X business et sa volonté de faire reconnaître cette industrie. Vous dénigrez ainsi tout le travail de reconnaissance que des gens ont essayé d’apporter à cette industrie.

D’ailleurs il est intéressant de noter que jamais vous ne dites X business, vidéos pour adultes ou star du X. Vous n’utilisez que le mot porno, comme un retour aux années 70 – 80 quand tous ceux qui le faisaient travaillaient dans l’ombre et étaient méprisés par le monde mainstream. Mais n’oubliez pas une chose, peut-être que sans les Hot d’Or, aussi imparfaits étaient-ils, la tolérance vis à vis de votre « porno » n’existerait pas.
Enfin une toute dernière chose, encore plus personnelle, je trouve toujours un peu triste de voir quelqu’un du métier venir cracher dans la soupe, quelques années après en être parti. Dix ans après avoir quitté Hot Vidéo, on ne m’a jamais entendu critiquer, dénigrer ou dévoiler les coulisses du magazine. Mais ça…

Ancien journaliste à Hot Vidéo, embarqué aujourd’hui dans d’autres aventures, loin des Hot d’Or, du X business et des paillettes. Mange des sushis et des cupcakes en rageant contre la pensée unique.

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