Suivez-nous

Actu/News

Plan Chems : quand les gays mêlent drogue et sexe

Publié

le

Depuis plusieurs années, c’est devenu un véritable phénomène qui inquiète grandement les services de santé et les associations gays. Le « Plan Chems » est en train de dangereusement se démocratiser et désormais on trouve régulièrement des annonces sur des applis de drague type Grindr de mecs voulant se faire des « plans planants » (comprendre sous drogue). Quels sont les profils de mecs qui se livrent à cette nouvelle pratique ? Que recherchent-ils dans ce délire et qu’y trouvent-ils ?

Tout le monde est susceptible de « tomber dans un plan chems »

Baptiste a 32 ans et vit à Paris. Il se souvient avoir fait son premier plan chems par hasard. « J’étais allé chez un mec pour me faire prendre et dominer. Il avait chez lui de la coke à dispo, il m’a demandé si je voulais goûter. Je n’avais jamais pris de drogue dure jusqu’alors et j’ai hésité. Et puis, dans le feu de l’action, j’ai fini par accepter. J’avais envie de faire l’expérience, de me lâcher. Ca a été un des meilleurs plans cul de ma vie. Je n’avais plus aucune gêne, je me suis complètement donné, j’étais hyper chaud, comme en transe. Le lendemain, j’étais cassé et je me suis dit que je ne recommencerai pas. Et puis je me suis pas mal branlé en repensant à ce moment, je suis tombé sur des profils qui parlaient de plans chems. J’ai recommencé. Une fois, puis deux. J’ai sympathisé avec les mecs, qui étaient des domis bourrins pendant le sexe mais plutôt cool en dehors. Ils m’ont proposé de me mettre « à dispo » d’autres mecs. C’était un gros fantasme. Je matais depuis des années des vidéos de gang bang en fantasmant un jour de me faire un délire comme ça. Mais j’osais pas, je me sentais pas prêt à « encaisser ». Ils m’ont proposé de tenter de prendre de la cristal meth. J’ai dit oui. J’ai complètement plané, je me suis retrouvé avec 7 mecs sur moi qui m’ont pris toute la nuit. L’éclate totale. C’est là que ça a basculé : j’avais goûté à un nouveau trip ultra fort, plus intense que tout le reste et j’avais envie de recommencer, d’enchaîner. J’ai passé deux mois hardcore, j’étais lessivé mais j’en voulais encore et toujours plus. Mes journées de boulot me paraissaient interminables. Je ne pensais plus qu’à me faire sauter en permanence. C’est seulement quand j’ai fini à l’hôpital après un mauvais délire et que j’ai été obligé d’appeler des amis que j’ai réalisé que j’étais allé trop loin ».

chemsex_01Baptiste n’était à la base pas du tout prédisposé à devenir un accro à la drogue. C’est un garçon normal, enfance heureuse, coming out fait sans douleur, amis présents et à l’écoute en cas de besoin. Il travaille dans un bureau, ressemble définitivement à Monsieur tout le monde. Quand on lui demande ce qui selon lui l’a fait « vriller » il trouve rapidement la réponse : « Je venais de rompre avec mon copain. Je n’allais pas très bien mais je ne voulais pas l’admettre. J’avais envie de sexe, de rencontres anonymes. J’ai commencé par aller sur les applis de drague tous les soirs puis la journée aussi dès que j’avais une pause au bureau. Je suis passif et j’avais depuis longtemps le fantasme d’être soumis. Et ça a été l’escalade : j’avais envie de trucs toujours plus forts, toujours plus trash. J’étais pris par un truc d’auto-destruction que je n’arrivais pas à m’expliquer et dont je ne souhaitais pas parler avec mes amis. Je ne voulais pas qu’ils aient une mauvaise image de moi. J’ai toujours été plutôt lisse, sérieux. J’avais pas envie d’être catalogué comme « la lope ». »

Selon les professionnels, les profils susceptibles de s’adonner à un plan chems sont assez divers. Ils peuvent comme Baptiste traverser une période difficile ou simplement répondre à des pulsions enfouies. Ils peuvent aussi avoir souffert d’un rejet familial, avoir un rapport compliqué à leur homosexualité. Ce qui alarme tout le monde, c’est que dans le fond personne n’est à l’abris : toutes les catégories socioprofessionnelles sont touchées, tous les âges. Le point commun des « chems addict » est qu’ils sont attirés par une sexualité hard, une envie de transgression, un besoin de s’abandonner et de s’oublier, sans parvenir à dire « stop ».

La tentation à portée de clic, le bareback comme finalité

Tout le danger réside dans le fait que les plans chems s’affichent de plus en plus. D’une appli sur laquelle tout le monde va comme Grindr à une autre plus hard comme Recon, les garçons assument leur envie de se défoncer ensemble sans la moindre culpabilité. Pour eux, le plan chems est un trip en soi, une façon de vivre sa sexualité de façon plus intense et libérée. Ceux qui les jugent ne « comprendraient rien ».

chemsex_02Si certains pratiquent les plans chems en restant safe, la majorité finissent par faire rimer la pratique avec le bareback. C’est là que les choses se corsent sérieusement jusqu’à tourner définitivement au glauque. Des garçons soumis, emportés par leurs pulsions et sous l’emprise de la drogue, finissent par accepter de se faire prendre sans capote ou pire de participer à un plan qui vise à les contaminer avec leur propre consentement ! Un documentaire vient de sortir sur les liens entre plans chems et sexe non protégé : Chemsex de William Fairman et Max Gogarty (pas encore de date de sortie en France / Bande-annonce). Le film, extrêmement dur et frontal, nous plonge dans l’enfer de garçons ordinaires étant devenus accros au sexe à risque et à la came.

Les deux réalisateurs filment des gays aux âges variés (20, 30, 40 ans) qui apparaissent tous totalement détruits. Souvent avec les larmes aux yeux ou tremblants, ils constatent face caméra qu’ils ne peuvent expliquer clairement comment ils en sont arrivés là. La plupart des mecs ont désormais le Sida, ont perdu leur travail ou leurs amis, ont parfois passé une semaine entière à se défoncer et accumuler les plans hard, en perdant toute notion du temps.

Ce long-métrage dérangeant a le mérite de mettre en lumière, en se focalisant sur la situation alarmante de la chose au Royaume-Uni, un problème que beaucoup ne veulent pas voir ou considérer. La majorité des institutions restent dépassées par le phénomène et le combattre est un énorme casse-tête. Le succès des applications de drague, la banalisation du sexe consommé de façon compulsive, rendent l’exposition aux risques plus forte que jamais.

Chemsex dévoile un des sites principaux en cause dans l’explosion des plans chems et bareback : Bbzone. De nombreux gays s’y inscrivent, acceptant les conditions spécifiant qu’ils encourent de graves risques pour leur santé. En dialoguant avec les différents usagers, ils peuvent alors réaliser avec une facilité déconcertante des plans extrêmes, flirtant de façon plus ou moins consciente avec le morbide. La plupart des dominants et « contaminateurs », cherchant des « bonnes salopes à doser », proposent aisément de la drogue pour « déstresser » leur partenaire. Sous GHB, coke, meth ou en pratiquant des injections (la pratique dite du « slam »), on ose faire ce qui peut paraître impensable en étant « clean ». Et voilà que l’horreur des cercles de contamination s’étend, en toute impunité.

chemsex_03Aller plus loin, au risque de ne jamais en revenir

Baptiste explique que pour lui la drogue a été une façon d’aller plus loin dans sa sexualité sans avoir peur. « Clairement, sans drogues je n’aurai pas été capable de faire un plan « mise à dispo » ou d’essayer des pratiques très hard. Je ne me sentais pas assez expérimenté, pas assez à l’aise avec mon corps. La drogue m’a, si je peux le dire ainsi, aidé à réaliser ces fantasmes. Et je dois avouer que c’est grisant quand on en prend et qu’on vit toutes ces choses. On prend un plaisir fou, on est ailleurs. Et on a envie d’aller toujours plus loin. Le problème est que sans s’en rendre compte on devient accro. Et quand on le réalise, on est déjà allé trop loin. C’est facile pour quelqu’un qui n’a jamais essayé de dire : ce mec est un addict, il n’a aucune volonté. Mais c’est vraiment un engrenage, une fois qu’on commence, qu’on se laisse aller, on peut difficilement s’arrêter. Moi, j’avais envie de me mettre en danger, de pousser mes limites. J’ai eu l’impression de découvrir un nouveau monde, de vivre des choses incroyables, d’autant plus excitantes qu’elles sont perçues comme mauvaises, interdites, à la marge. Je me suis dit que c’était cool, que je m’éclatais. Et puis un jour je me suis retrouvé à l’hôpital, j’ai réalisé que j’avais été jusqu’à me piquer et que le pire dans tout ça c’est que je pensais déjà à recommencer. J’ai pleuré, j’ai réalisé que j’étais devenu une merde ».

En quête de solutions

Pas facile une fois pris dans l’engrenage de s’en échapper. Le film Chemsex met en avant un institut d’aide spécialisé au Royaume-Uni qui aide les gays sujets à ces addictions. En France, les institutions semblent encore chercher à comment faire face à un fléau qui laisse perplexe. Les spots de prévention du type « La drogue c’est mal » ne sont pas efficaces, l’inclination grandissante des gays pour l’auto-destruction est difficilement contrôlable. A part conseiller à tous de ne jamais commencer, les méthodes et les mots manquent encore… et c’est vraiment flippant.

Thomas s'abreuve de porno depuis ses 15 ans. Après les premiers émois des VHS hétéros, il développe une passion débordante pour le x gay alors qu'Internet fait son apparition. Pornophage et curieux, tous les genres et fétiches attisent sa curiosité. Il partage ses fantasmes et addictions sur son propre blog, Gaypornocreme, et régulièrement pour le magazine gay Qweek.

Populaire

Merci de désactiver votre bloqueur de publicité pour accéder à ce site.

ADBLOCK a cassé ce site en voulant supprimer son contenu publicitaire.
Désactivez ADBLOCK pour consulter nos articles.