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Accès au porno : les nouveaux défis de la protection des mineurs
L’exposition des mineurs à la pornographie se fait de plus en plus jeune. On parle aujourd’hui de l’âge de 8 ans pour la première image de cul aperçu par la future génération. Et les solutions tardent à arriver ; en témoigne la récente sortie du Président de la République, posant un ultimatum de six mois aux fournisseurs d’accès Internet, pour la mise en place d’une protection globale des mineurs sur la toile. En attendant, la société civile peine à endiguer le phénomène, faute d’emprise sur la dimension tentaculaire du problème. Alors que faire quand on est parent, tuteur, grand frère ou grande sœur, ou tout simplement adulte responsable, pour empêcher le petit Timothée de s’initier bien trop jeune aux arcanes subtiles de la double pénétration ?
Les vieux cons
On pourrait commencer par jouer les vieux cons. Crier au laxisme parental de cette nouvelle génération qui s’avère être la nôtre. S’époumoner contre la désinvolture coupable avec laquelle on considère l’accès au monde numérique. Arguer qu’à une époque pas si lointaine, il était impensable de laisser un môme de 12 ans naviguer à sa guise sur le web, sans surveillance. D’autres rétorqueront alors qu’il faut vivre avec son temps, que la fée smartphone a envahi les foyers, que le terminal connecté est devenu un outil de sociabilisation indispensable au pré-ado, que l’en priver nuit à son développement… Depuis quand refuser de céder aux sirènes des modes de cours de récré est un signe de défaillance parentale ? Ceux d’entre nous qui ont été privés de Poké-mes-couilles et de Tamagot-chiasse durant leur prime jeunesse ont-ils nourri d’abominables troubles du développement à l’âge adulte ? Rien n’est moins sûr. Il serait peut-être temps d’admettre alors notre confondante responsabilité collective quant à la diffusion de la pornographie, mais aussi des contenus violents, publicitaires ou abrutissants dans les jardins d’enfants, avant de réclamer à Big Brother de torcher les mômes à nôtre place. Reste que ces constats un brin amers (et pas du tout vindicatifs) ne résolvent rien à cette crise aujourd’hui bien installée. Aussi peut-être vaudrait-il mieux changer son fusil d’épaule, accepter notre échec en tant que civilisation et commencer par circonscrire le problème étape par étape.
Freiner les Vasco de Gama en culotte courte
Puisque bannir les téléphones et autres tablettes des mains de nos progénitures a toutes les apparences d’une utopie depuis longtemps hors de portée, la première mesure raisonnable pour les préserver du vice consiste évidemment à restreindre leurs possibilités de navigation sur les océans virtuels. La navigation restreinte est ainsi le cheval de bataille de tout logiciel de protection parentale qui se respecte. Via un système de blacklist, mis à jour par l’éditeur et généralement personnalisable, le logiciel tiers bloque l’accès du navigateur internet à toutes les adresses douteuses référencées. Une « white-list » parallèle permet d’inclure à discrétion les adresses préalablement contrôlées qui contiendrait malgré tout des mots-clés tels que « zézette », « zigounette », ou encore « foufoune », tout ce vocabulaire fleuri et innocent employé par les jeunes d’aujourd’hui.
Autant dire que le contrôle de la navigation web est le b.a.ba d’un environnement numérique sain pour les plus jeunes. Mais ça ne suffit largement plus. Et pour cause, le gros du trafic internet des 8-18 ans est aujourd’hui accaparé par les plateformes sociales.
Fermer le Store
Le flux des applications de smartphone ne transite pas par les mêmes programmes que la navigation internet. Aussi, les restrictions qui y ont cours ne s’appliquent pas aux réseaux sociaux dès lors qu’ils sont consultés depuis un téléphone. Du coup, et même si Facebook et Instagram appliquent une censure rigoureuse de tout ce qui ressemble de près ou de loin à un nibard (ou presque), les autres plateformes, telles que Twitter ou Snapchat, ne pratiquent aucun contrôle entre l’âge de l’utilisateur et les contenus parfois explicites qu’il consulte. La solution ? Commencer par nettoyer le portable de Timothée de toutes les applications type « réseau social ». Nous constatons tous quotidiennement les effets délétères qu’ont ces réseaux sur nos vies (cyber-harcèlement, fake news, contenus non-sollicités) ; pas la peine d’exposer des gosses de moins de 16 ans à ce genre d’expériences.
Ensuite, il convient de verrouiller le Store de l’appareil. Apple comme Google disposent d’un contrôle parental intégré limitant les contenus accessibles depuis leurs magasins selon des critères d’âge (ils ne permettent pas en revanche de désactiver complètement le téléchargement d’applications). Le téléphone est à présent coupé de l’immense majorité du contenu porno que l’on trouve sur le web. Il subsiste cependant un dernier point épineux, celui des communications.
L’œil de Moscou
Fonctionnalité primordiale des téléphones d’aujourd’hui, les programmes de messagerie n’en sont pas moins des sources de danger pornographique potentielles pour les enfants. Whatsapp, Messenger, ou même les SMS permettent en effet le partage de n’importe quel contenu multimédia (texte, image, son, vidéo, etc.). D’ici à ce que Timothée reçoivent quelques vignettes salaces de la part d’un camarade de classe un peu précoce, ou que la petite Louna envoie ses premiers nudes à Jordan, « l’homme de sa vie », il n’y a qu’un pas qu’on ne veut surtout pas franchir. Malheureusement, en dehors du dialogue parent-enfant, et d’une veille régulière de la part du tuteur quant aux images reçues, il n’y a pas grand chose à faire. Il existe bien tout un tas de logiciels qui permettent d’espionner l’intégralité de ce qui entre et sort du téléphone de ses enfants, mais a-t-on vraiment envie d’inculquer la surveillance générale ambiance « RDA » comme base fondamentale de la sécurité ?
Anti-X business
C’est la grande problématique des logiciels et applications de contrôle parental de nouvelle génération : confier à Big Brother la sécurité numérique de nos enfants. Reconnaissons-le ; ni Google, ni Facebook, ni Apple, ni Orange ne sont réellement intéressés par la protection des mineurs vis-à-vis du X. Ce que ces boîtes veulent, c’est développer le marché de la téléphonie et du Net auprès d’une frange de consommateurs qui leur était jusque là inaccessible. À travers les solutions « tout-en-un » qu’elles proposent aujourd’hui, ce ne sont pas des environnements sécurisés qu’elles conçoivent, mais des espaces commerciaux où l’on fera le meilleur usage possible du temps de cerveau que les gosses mettent à leur disposition. Publicité ciblée, collecte de données personnelles, géolocalisation, mais aussi fuites de données, contournements et piratages, voilà la face sombre des programmes de protections actuellement sur le marché. En outre, il est fortement conseillé de superviser manuellement chaque aspect de la vie numérique de ses marmots plutôt que d’opter pour des programmes qui promettent ce genre de « couverture totale ».
À terme, il convient aussi d’abolir ce concept de couverture totale. Les enfants d’aujourd’hui, comme ceux des générations précédentes, seront inévitablement confrontés aux contenus pas très jojo que les adultes produisent, et la vision d’une paire de miches, même particulièrement dilatée, n’en est peut-être pas l’aspect le plus inquiétant. Que reste-t-il à faire alors ? Rien, si ce n’est les y préparer, les former, démystifier pour eux le pouvoir des images et, autant que faire se peut, les en éloigner…
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