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Le X à l’heure du virus

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Alors que la pandémie fait rage, l’humanité toute entière apprend bon gré mal gré à se familiariser avec le tout nouveau concept de distanciation sociale. On arrête de claquer la bise ; on évite de tripoter tout et n’importe quoi, et en particulier autrui, avec ses paluches pleines de doigts ; on cesse de s’agglutiner à des foules d’inconnus dans les bars, les boîtes de nuits, les restaurants, les transports en commun. Or, s’il est un domaine qui s’accommode assez mal de la limitation des interactions, c’est bien le porno. En effet, pas évident, la levrette en télétravail ; pas facile, la double péné en combinaison hazmat… D’où l’inévitable question : comment se porte le X à l’heure du confinement ?

Depuis plusieurs semaines déjà, le X-business frémissait, étant donné la grande mobilité nationale et transnationale qu’il exige de ses performeurs. Dès l’annonce des premiers contrôles aux frontières, la Free Speech Coalition, syndicat américain de la profession très à cheval sur la protection de son territoire, éditait une feuille de route consultative à l’usage de tous les travailleurs : acteurs, techniciens, producteurs. Hygiène et propreté, précaution et bon sens vis-à-vis des symptômes, limitations des déplacements internationaux et enfin, invitation à tourner un maximum d’extras (coulisses, contenus additionnels, séquences solo), en perspective d’un durcissement des mesures de quarantaines. Ça n’a pas manqué.

Alors que les performeurs annoncent les uns à la suite des autres leur éloignement des plateaux, pour leur propre santé, mais aussi celle de leurs proches et de tous ceux avec qui ils auraient été amenés à collaborer, les boîtes de prod’, les réalisateurs, les agences décrètent en cascade la suspension de leur activité. France, Europe, Etats-Unis, toute la planète porno est à l’arrêt ; et comme pour entériner un état de fait, la FSC publie finalement un communiqué appelant à l’interruption volontaire des tournages le temps du confinement. Aussi, la coalition adresse un problème contingent à l’arrêt de l’activité : celui, immanent, de l’argent.

Comme tous les milieux professionnels construits sur l’auto-entrepreneuriat, le porno implique pour nombre de ses travailleurs une rémunération à flux tendu. Or, les mesures de confinement mondialement cooptées pourraient plonger tous les acteurs de ce milieu dans une précarité économique critique ; une précarité qui n’éveille en outre aucune compassion, aucune implication des autorités gouvernementales. Il est donc plus essentiel que jamais de rappeler l’importance de payer pour son porno, de soutenir les travailleurs du sexe de tous horizons en cette période de disette en achetant leurs vidéos, en s’abonnant à leurs réseaux, en lâchant son tip. La solidarité sera le seul remède à notre crise planétaire actuelle.

Ceci dit, l’épidémie pourrait de pas avoir que des conséquences délétères sur le X-business. Imaginez : des millions de personnes, cloîtrées seules chez elles, avec pour seule distraction une connexion à Internet et des montagnes de papier toilette à disposition… Vous voyez où je veux en venir ? Oui ! On est à deux doigts d’inaugurer les Journées Internationales de l’Onanisme, de décréter l’ouverture du Mondial de la Branlette. Trois semaines de pougnettes sans interruption. Aussi, on peut s’attendre à une explosion du trafic sur les sites de cul ; et pour peu que le branlotin séquestré soit prêt à mettre la main à la poche pour se farcir autre chose que les affligeants fonds de catalogues disponibles sur les tubes gratuits, toute cette histoire promet une belle embellie économique au printemps du côté des producteurs et distributeurs de porno. D’ailleurs, ces derniers ne s’y sont pas trompés, puisque chacun y va de son offre promotionnelle pour appâter le chaland désœuvré mais néanmoins volontaire ; à commencer par les incontournables Jacquie & Michel qui mettent à disposition, jour après jour, quelques-unes de leurs réalisations les plus plébiscitées, en toute gratuité.

Enfin, ce devrait être au tour des camgirls de tirer leur épingle du jeu lors des prochaines semaines. Souvent perçues comme la deuxième division du charme, derrière l’industrie des studios, les reines du solo pourraient bien prendre leur revanche. Et pour cause, rester enfermée dans sa chambre à se tripoter devant son ordinateur est, pour ainsi dire, leur cœur de métier. Toutefois, les principaux effets de la quarantaine sur leur activité seront certes de décupler le nombre de spectateurs à l’autre bout du tuyau, mais aussi de durcir la concurrence. Faute d’alternatives lucratives, des milliers d’actrices au chômage technique vont profiter de l’accalmie pour entretenir leur communauté virtuelle à grands renforts de séquences maison et de shows par écrans interposés. Une chose est sûre, les plateformes de caming vont, elles, s’en mettre plein les fouilles ! (La décence voudrait par ailleurs qu’elles rognent leur com’ au bénéfice des modèles, au nom de l’effort collectif.)

Quoi qu’il en soit, l’univers du charme a pris la mesure du risque encouru. Comme pour beaucoup de secteurs, les temps s’annoncent difficiles ; la solidarité, l’entraide et la bienveillance seront de mise. N’espérez donc pas de grandes révolutions dans le domaine de la fesse pour les prochaines semaines, mais profitez-en pour cajoler l’actrice, l’acteur, la camgirl, le performeur porno de vos rêves pendant cette période de galère, ils le méritent. Enfin, à défaut de nouveautés, c’est sans doute aussi l’occasion de s’initier à des fantasmes pornographiques que vous n’avez jamais eu le temps, le courage ou la curiosité d’explorer. Car s’il nous reste une certitude à l’aube de la fin des temps, c’est que le porno est une source inépuisable de divertissements solitaires

Bonne quarantaine à tous.

Titulaire d'une maîtrise en cinéma, auteur d'une Porn Study à l'Université Paris VII Diderot, Clint B. est aujourd'hui chroniqueur de l'actualité porno.

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