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[CULture G] Comment l’Amiral Nelson est devenu une position sexuelle hardcore

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Le 21 octobre 1805, à bord de l’HMS Victory, le vice-amiral Horatio Nelson, Premier Vicomte Nelson, Duc de Bronte et Baron du Nil, s’éteint. Mortellement blessé par un tir ennemi qui lui a transpercé le poumon et brisé la colonne vertébrale, il quitte le pont, non sans donner les dernières directives tactiques à son équipage, déjà victorieux de la bataille de Trafalgar. Autour d’eux, l’armada napoléonienne, la plus puissante flotte de l’histoire de la marine, est éparpillée par petits bouts, façon « puzzle », à l’embouchure de la Méditerranée à la suite d’une déculottée navale comme on n’en avait encore jamais vue.

Elevé pour l’éternité au rang de héros britannique, Horatio Nelson, le Fléau des Mers, lègue à la fierté et à la culture anglo-saxonne un héritage flamboyant. Le 21 octobre est décrété « Trafalgar Day » en l’honneur de la « mémoire immortelle » du vice-amiral ; l’on érige des colonnes surplombées d’une statue à son effigie dans tout le Commonwealth, au premier rang desquels se trouve évidemment le monument londonien de Trafalgar Square ; ses ordres « England expects that every man will do his duty » deviennent devise nationale ; son dernier vaisseau, ses vêtements tachés de sang, la balle qui l’a abattu sont conservés comme autant de pièces de musée… Le souvenir de Nelson, de sa grandeur, est si vivace dans l’imaginaire collectif, qu’il imprègne des domaines à mille lieux des contingences aquatiques. C’est ainsi que par un jeu de métonymie assez délectable, le vice-amiral Nelson finit par donner son nom à l’une des positions sexuelles les plus hardcore du répertoire porno.

The Destruction of L’Orient at the Battle of the Nile, de George Arnald, 1827.

Premier août 1798, baie d’Aboukir, Egypte, seize heures. À un jet de pierre d’Alexandrie, dont le port s’est finalement révélé trop petit pour elle, la flotte française mouille paisiblement, à quelques encablures des côtes, cernée par les hauts-fonds. Envoyée pour conduire l’ambitieuse campagne égyptienne de l’orgueilleux Napoléon Bonaparte, alors général, elle peut se réjouir d’avoir devancé l’armada britannique, commandée par le vice-amiral Nelson, à ses trousses depuis de longs mois. Le soulagement est de courte durée car, déjà, le pavillon de la Royal Navy point à l’horizon. Abandonnant l’idée de livrer bataille en haute mer, un tiers des hommes étant descendu à terre pour réapprovisionner les vivres, le commandement français opte pour une position défensive statique que le vice-amiral François Paul de Brueys d’Aigalliers estime inexpugnable. Treize vaisseaux de ligne, soit 1 190 canons, attendent la canaille britonne en une formation linéaire qui s’étend sur plus de deux kilomètres, à raison de cent-cinquante mètres entre chaque navire. En face, les effectifs sont comparables, treize navires de ligne pour 1 012 canons. Dans l’hypothèse d’une bataille rangée, les auspices semblent favorables aux Français. C’est sans compter sur l’astuce d’Horatio Nelson, peu enclin à faire parader ses bâtiments sous les bordées ennemies dans une parodie d’attraction foraine. Il scinde alors sa flotte en deux et envoie la moitié de ses navires contourner la ligne française, pour pilonner les embarcations adverses les unes après les autres dans un feu croisé. Le 2 août au matin, le bilan est sans appel. Plus de 3 000 morts pour autant de captifs, quand les effectifs britanniques accusent seulement 895 pertes (218 morts, 677 blessés), la marine française est à genoux. Sur ses treize navires de ligne, seuls deux en ont réchappé ; neuf sont alors aux mains de l’ennemi, tandis que l’Orient, le vaisseau-amiral, fut pulvérisé au milieu de la nuit dans une explosion si formidable qu’on crut l’aurore venue. Horatio Nelson remporte une victoire éclatante ; sa tactique impitoyable s’impose comme une nouvelle référence dans les arts de la guerre : un étau inextricable.

Cet ainsi que le monde de la lutte, des décennies plus tard, s’en empare, se l’approprie, conservant en hommage le nom de son illustre précurseur. Sur les tapis comme sur les mers, le « Nelson » consiste à prendre l’ennemi à revers pour verrouiller, de part et d’autre, les options offensives de son adversaire, jusqu’à la soumission complète. Pour appliquer un Full Nelson en combat singulier, il faut donc passer dans le dos de son opposant, afin de glisser un bras sous chacune de ses aisselles avant de verrouiller la prise en joignant les mains contre la nuque du pauvre bougre alors neutralisé. Si l’on parle de Full Nelson, ou de « double Nelson », c’est que la technique s’est déclinée en formes n’immobilisant qu’un seul bras : quarter nelson, half nelson, three-quarter nelson, en fonction de la solidité du verrouillage entre l’épaule et la nuque du supplicié. Particulièrement exigeant et dangereux, puisque impliquant directement les cervicales, le Full Nelson est banni de la plupart des ligues amateurs et strictement réglementé au niveau professionnel, en tant que prise de contrôle et non de soumission finale. Sa dimension éminemment spectaculaire, par la suprématie qu’elle suggère, a cependant fait de cette technique un geste prisé du catch professionnel.

 

Spectacle, engagement physique, suprématie manifeste, il n’en fallait pas plus pour que le gonzo s’empare d’un tel motif. Sous l’impulsion de J-mac, archétype du golgoth sous stéroïdes made in USA, le Full Nelson fait une entrée fracassante au panthéon des positions sexuelles hardcore. Bien qu’il ne soit sans doute pas le premier à mettre les arcanes pugilistiques au service de l’art pornographique, le colosse de Floride s’est fait remarquer en infligeant cette soumission dressé sur ses jambes, à des actrices aussi lilliputiennes qu’hyperlaxes. Comble de la performance, la variante pornographique pourrait même porter le nom de « quadruple Nelson », puisque l’actrice est alors saisie non pas sous les aisselles, mais sous les genoux, immobilisée des quatre membres simultanément. Inutile de préciser qu’au vu de l’intensité, outre une force physique conséquente, la plus grande des délicatesses est de mise, sous peine de rompre la pauvrette empalée. Les plus modestes se contentent d’ailleurs de la réaliser allongé. On perd en spectacle ce qu’on gagne en confort, dirons-nous. Certaines crieront au machisme militant d’une telle pratique (elles auront plutôt raison), d’autres mouilleront leur dessous, s’imaginant conquises physiquement, soumises impuissantes aux coups de boutoir d’un étalon bodybuildé au sommet de sa puissance viril. Chacun son trip.

Des batailles navales aux krav-maga sexuel option « sodomie », voilà donc comment Horatio Nelson a inscrit son nom dans l’histoire du X, avec une invraisemblable pertinence. Le fait est ; on pourrait difficilement mieux signifier la brutalité punitive avec laquelle l’Amiral légendaire a, à maintes reprises, empalé Napoléon et sa flotte au bout de son beaupré.

Titulaire d'une maîtrise en cinéma, auteur d'une Porn Study à l'Université Paris VII Diderot, Clint B. est aujourd'hui chroniqueur de l'actualité porno.

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