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Peut-on forniquer dans son jardin ?
La saison des câlins dans l’herbe arrive à grands pas, alors voici quelques astuces pour s’aimer ensoleillé et en toute liberté.
L’été arrive, les beaux jours reviennent. Et avec la belle saison, les envies de sexe en plein air se font toujours plus pressantes. Or, pour se prémunir des importuns, le mieux est encore de baiser dans son jardin, pas vrai ? Hélas, nous allons voir que le problème est plus complexe qu’une bête affaire de propriété privée. Il est peut-être judicieux de s’intéresser au sujet avant de soulever madame ou d’attraper monsieur au milieu du gazon. Prolétaires de banlieue et bourgeois de centre-ville, ne quittez pas, ces quelques considérations légales concernent tout autant les propriétaires de terrasses et de balcons.
« M’exposer un peu plus au soleil… »
Alors, pourquoi qu’on pourrait pas faire crac-crac dans le transat à la faveur du soleil dominical, hein ? Après tout, on est chez nous, non ? Sauf que ce n’est pas aussi simple. L’énoncé de l’article 222-32 du Code pénal, relatif aux histoires de zézette en public, nécessite quelques précisions pour en saisir toutes les subtilités : « L’exhibition sexuelle imposée à la vue d’autrui dans un lieu accessible aux regards du public est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. » En outre, même tout habillés, « la commission d’un explicite d’un acte sexuel, réel ou simulé », est elle aussi réprimée. Enfin, les peines sont doublées si les faits sont commis en présence d’un mineur de moins de 15 ans.
Ainsi, l’exhibition sexuelle ne se résume pas aux seuls « lieux publics », mais aux « lieux accessibles aux regards du public ». La nuance a son importance, car elle signifie que l’on peut se voir inculpé d’exhibition sexuelle depuis une propriété privée, a fortiori lorsqu’on en est le propriétaire. Pour peu qu’on puisse être aperçu depuis la voie publique ou, disons, la fenêtre d’un voisin indiscret, on est éligible aux poursuites. Donc les galipettes au pied de la balançoire des enfants, confiés à papi-mamie pour l’occasion, on oublie ? Circulez, il n’y a plus rien à voir ?
Jardin secret
Pas si vite ! Déjà, si vous vous payez le luxe de disposer d’un jardin sans vis-à-vis, ni accès direct depuis la route, faites-vous plaiz’. Idem si vous jouissez d’un balcon terrasse au dernier étage de l’immeuble. Personne ne viendra vous enquiquiner. Pour le reste du monde, il va falloir ruser. Car la loi est claire, l’exhibition doit être « imposée ». Or, nul ne peut se déclarer contraint et choqué d’avoir entrevu votre galbe charnu pistonner en cadence, s’il a fallu grimper, se contorsionner ou se pencher dangereusement dans le vide pour l’apercevoir.
On doit cette interprétation du texte à une jurisprudence cocasse de décembre 1994, qui voyait comparaître un couple surpris en pleine séance de tendresse dans la voiture, par un policier qui patrouillait dans le parking où étaient garés les tourtereaux. Le verdict actait la relaxe, statuant que le véhicule était « stationné dans un parking, toutes portes fermées, et qu’en raison de la position des intéressés, l’exhibition sexuelle à laquelle ils se livraient n’était pas normalement visible de l’extérieur sauf à venir tout spécialement regarder à l’intérieur du véhicule comme l’a fait le gardien de la paix. »
En clair, si personne ne peut vous voir directement alors que vous perpétrez l’acte de chair, vous ne serez normalement pas inquiété. Et rien ne vous empêche de bâtir votre petit coin de paradis à l’abri des voyeurs pour y parvenir. Il est en effet possible d’aménager l’espace à l’aide de paravents et autres brises-vues de sorte à créer des angles morts dans les lignes de tir ennemies. Labyrinthe des plaisirs, tipi d’amour, canopée sensuelle, libre à vous d’improviser, en fonction de la surface disponible, des perspectives à couvrir, de l’exposition au soleil (pensez à l’écran total).
Garden partouze
À noter que, s’il n’y a guère que les conditions visuelles qui soient encadrées par l’article 222-32, il convient de surveiller son niveau sonore, à tout moment de la journée, ne serait-ce que pour éviter d’attirer l’attention – à moins que ce soit justement le but de la manœuvre, auquel cas, on ne juge pas. Quoi qu’il en soit le tapage, qu’il soit diurne ou nocturne, relève du trouble de voisinage. Il caractérise, le jour, « un bruit de comportement peut causer un trouble anormal de voisinage s’il est répétitif ou intensif ou s’il dure dans le temps ». Avantage aux précoces, donc.
En conclusion, on oublie les journées barbecue-partouze, à moins d’inviter tout le quartier. À cause de lois castratrices, la tendresse charnelle, l’amour passionnel et la leuleu claquée n’ont plus tellement leur place au soleil. La plus grande discrétion sera donc l’ultime recours pour les inconditionnels de sexe en plein air. Un voisin procédurier, un passant intrusif et une justice tatillonne auront tôt fait de ruiner un beau moment d’intimité improvisé dans les thuyas. Mais au fond, n’est-ce pas justement ce petit parfum d’interdit qui rend tout ça si excitant ?
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