Décryptages
Le business de la désintox porno
Il est arrivé à tout le monde de ressentir ce léger sentiment de honte post-branlette, généralement suite à la vision attentive d’un métrage sadomasochiste allemand ou d’une fantaisie japonaise où, dans un bus bondé, une belle nippone est entourée de quidams visiblement pas très au fait du #metoo. « N’est-ce pas un peu malsain tout ça ? Ne suis-je pas, au fond, un gros dégueulasse ? » Ce malaise, censé vous connecter à l’une des parts les plus essentielles de votre humanité, la dualité pulsion-morale, est surtout le fond de commerce d’un business aussi juteux que bouffi de bonnes intentions : la lutte contre l’addiction au porno, fléau de notre société ! (Tremblez, brave gens !) À mi-chemin entre les manuels de développement personnel neuneus et le sectarisme new-age, la lutte contre la branlette est avant tout une belle machine toute propre conçue pour convertir miraculeusement ces bonnes intentions en jolis tas de biffetons. Petite enquête sur les gourous du NoFap.
« Vous êtes anormal. Ce n’est pas de votre faute. »
La rhétorique de ce genre de programmes a deux mamelles : la culpabilisation indirecte et la perspective d’un mieux vivre. Et en ce qui concerne la culpabilisation indirecte, le porno a la tête du bon client, du bouc émissaire idéal. Pourvoyeur de récompenses physiologiques intenses et instantanées, controversé sur le plan moral voire éthique pour certains, il incarne le fruit défendu, le péché originel, cette tentation facilement accessible à laquelle nous ne devrions pas céder. Et les sites anti-porno sont prêts à tout pour vous faire comprendre que vos petites habitudes onanistes cachent en réalité une addiction qui ne dit pas son nom, induite par un médium délétère qui vous serait imposé. Ainsi, on y trouve systématiquement des recueils de témoignages d’anciens toxicomanes tous plus anxiogènes les uns que les autres, généralement construits sur l’argument de la pente glissante. En témoignent le fabuleux « Comment je suis passé du porno à la pédo-pornographie. » du site Stopporn, ou encore l’ésotérique « Age 24 – De la femdom regarder & bite molle à absolument slamming. Ceci est 100% battable. » du site YourBrainonPorn, qui se paie le luxe d’être traduit à la truelle.
« Je ne suis pas médecin, mais… »
L’argument par les victimes est toutefois limité. Après tout, chacun est libre de voir en notre ami amateur de pédo-pornographie un martyr de la pougnette ou un détraqué qui finira certainement en zonz’ un jour, porno ou pas porno. Aussi, il est essentiel d’y ajouter un peu de pseudo-science, histoire de crédibiliser le bousin avec des termes médicaux pompeux. C’est alors que ça vire au gang-bang, option « crachat dans la bouche » pour la rigueur scientifique et l’honnêteté intellectuelle. À grands coups de maladies fantasmées, de conférences Tedx contestables et de sophismes confondants tels que « depuis l’apparition d’Internet, 100% des jeunes hommes ont regardé du porno sur Internet » (Depuis l’invention de la télé, 100% des jeunes hommes ont vu une émission de télé, pensez-y.), on tricote un discours fallacieux à valeur de vérité. L’expert dans le domaine, c’est Gary Wilson, créateur de YourBrainonPorn, qui a même inventé un trouble psychologique à lui tout seul, le PIED, comme dans creampied (oui, c’est complètement gratuit). PIED, c’est pour Porn Induced Erectile Dysfunction, le dysfonctionnement érectile induit par l’accoutumance à l’excitation que provoquerait la consultation assidue de pornographie. Le syndrome a en outre été débunké par le très sérieux Medical News Today ; il n’existe aucune corrélation statistique entre la quantité de boulards consommés et l’incapacité à hisser le pavillon. Le porno aurait au contraire quelques effets positifs sur les troubles de l’érection en général. L’affabulateur a toutefois l’élégance de soumettre, en tout petit au bas de la page, un « avis de non-responsabilité médicale » dont voici la teneur.
Cet aveu officiel d’incompétence ne va pas sans poser de sérieux problèmes d’éthique à la démarche. En effet, les comportements addictifs et les personnalités prédisposées à l’addiction sont une réalité médicale qu’on ne peut prendre à la légère. Et si le porno ne constitue pas une addiction au sens scientifique du terme (comme nous le soulignions ici), sa propension à la récompense en fait un terrain très propice à la fixation obsessionnelle, à l’instar de la nourriture ou du sport. Prétendre guérir ces troubles à coup de citations « inspirationnelles » indignes de votre premier skyblog relève au mieux du charlatanisme. La santé est une affaire de professionnels, médecins, psychologues, pas de guérisseurs improvisés et intéressés.
Le remède au bout du forfait Premium
Si la désinformation est en soi condamnable, c’est lorsqu’elle est associée à une démarche marchande qu’elle devient vraiment inquiétante. Car les ayatollahs de l’anti-porno ont toujours quelque chose à vendre, et ils le font savoir. De StopPorn à YourBrainonPorn, il n’est pas une page sans qu’il ne soit fait mention du bouquin du maître des lieux, toujours un type comme vous et moi, un survivant du porno, qui vous vend humblement sa recette maison au prix compétitif d’un euro les dix pages. À vot’ bon cœur, M’sieur, dames !
Mais les champions incontestés du game sont sans doute l’équipe de FightTheNewDrug (Tremblez, on vous a dit !). En plus de disposer d’un véritable merchandising qui vous permet, grâce à un T-Shirt à 22$, de faire savoir à vos contemporains que vous avez arrêté de vous branler (on est ravi), le site propose Fortify, une application de type « freemium » : entrée gratuite, mais fonctionnalités et suivi avancé payants. Parce qu’après tout, pourquoi soigner les gens gratuitement quand on peut extorquer quelques deniers à leur désespoir au cours du processus ? Sur ce point, on peut dire qu’ils sont tout à fait raccord avec l’industrie pharmaceutique, au moins.
Le mythe d’une vie saine
Information biaisée adressée à un public désemparé et incertain, profit personnel du prédicateur, ne seraient-ce pas là les éléments caractéristiques d’une dynamique sectaire ? Heureusement non, il faudrait encore caractériser la promotion d’une croyance en un avenir radieux.
Ça, c’est ballot. Sur ces plateformes, le discours prend invariablement une dimension miraculeuse, soulignée de sunshine.jpeg libres de droits. Les témoignages compilés, unanimes, tiennent à peu près tous ce langage : « Depuis que j’ai arrêté de me tripoter, je bande plus fort, j’ai renoué le dialogue avec ma femme, mes enfants me respectent, mon chien rapporte la balle, je plais aux femmes, mes cheveux repoussent, j’ai perdu 15 kilos et gagné 100 000 balles, etc., etc. » Les marabouts de gare du nord n’ont qu’à bien se tenir.
En somme, ces plaidoyers anti-porno nous re-servent le mythe réchauffé de la vie saine, où masturbation rime avec aliénation et isolement, pornographie avec trafic d’êtres humains, et où chacun devrait aspirer à avoir une femme, des gosses et un labrador, faire du squash pour se défouler et baiser lumière éteinte, si possible en missionnaire. C’est oublier que la vie de couple est parfois pavée de compromis, de coercitions et de renoncements, que l’homme est aussi un être de pulsions à assouvir, que le plaisir sexuel est une fin en soi légitime et que le squash, c’est quand même hyper-chiant. C’est omettre que la pornographie est un travail consenti autant qu’un spectacle mis en scène et que son appréciation relève autant de la pulsion animale que de la catharsis aristotélicienne.
C’est ignorer que se pignoler, c’est avant tout se pardonner d’être imparfait.
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