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Larry Flynt, le dernier titan du porno, s’éteint à l’âge de 78 ans

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C’est véritablement la fin d’une ère. Après la disparition de Bob Guccione, patron historique de Penthouse, en 2010, puis celle du taulier de Playboy, le grand Hugh Hefner en 2017, c’est finalement au tour de Larry Flynt, dernier nabab du porno sur papier glacé, de casser sa pipe d’une crise cardiaque, ce mercredi à l’âge de 78 ans. Devenu, comme ses confrères, riche à millions sur le marché de la presse pornographique pour homme, le légendaire fondateur du magazine Hustler s’est érigé, tout au long de sa vie, en icône de la liberté d’expression, inlassable pourfendeur du politiquement correct.

Pionnier du pink

L’histoire commence en 1965, lorsqu’à l’âge de 23 ans, Larry acquiert le Keewee, un bar de Dayton (Ohio) que tient sa mère, avec les 1 800 $ qu’il a économisé de ses précédents jobs. Entrepreneur brillant et travailleur acharné, en le dédiant aux clients de la classe ouvrière, il fait vite de son premier établissement une affaire rentable, lui permettant d’investir dans un nouveau lieu de perdition, un bar à gogo-danseuse, le premier Hustler Club. Dayton, puis Cincinnati, Colombus, Toledo, Akron, la marque à succès devient une chaîne, dont il faut bien faire la promotion. D’où l’idée de publier une simple newsletter, promotionnelle et nécessairement graphique, vantant les charmes et les nouveautés des clubs qui poussent dans tout l’Ohio. Ce sont les prémices de Hustler Magazine.

La pagination de la brochure s’épaissit alors, pour devenir un journal en 1974, dans la droite lignée de ses modèles, Playboy et Penthouse, les références de la presse érotiques pour gentlemen : photos, comic strips, articles de fond, scandales… À un détail prêt. Là où les papas de la profession se limitaient à un érotisme certes polisson, mais chaste, adressé à un public intellectuel, Hustler revendique volontiers une ligne éditoriale plus leste, une photographie plus crue. Vulves exhibées, sextoys, pénétrations, Hustler quitte les rivages de la sensualité bon teint pour naviguer toutes voiles dehors dans les eaux tumultueuses de la pornographie, ringardisant d’un coup ses prédécesseurs.

Politiquement incorrect

La notoriété du titre devient mondiale l’année suivante quand, pour 18 000 $, Larry Flynt achète les droits de la paparazzade qui capta l’ancienne Première Dame des Etats-Unis Jackie Kennedy Onassis en tenue d’Eve, au sortir d’une séance de bronzage intégral, et la publie dans son magazine. De scandale en scandale, l’homme assoit alors sa réputation sulfureuse jusqu’au procès en obscénité mené contre lui en 1978 par le comté de Gwinnett (Géorgie), qui se soldera par une tentative d’assassinat sur sa personne par un suprémaciste blanc, révolté par un shooting interracial publié dans Hustler. Grièvement blessé lors de l’attentat, Flynt n’abdique pas pour autant. Et depuis le fauteuil roulant plaqué or dans lequel l’a cloué son agresseur pour le restant de ses jours, il continue par les actes de militer pour la liberté d’expression et le droit à la subversion, offrant des sommes faramineuses à quiconque révélerait des scandales politico-sexuels lors de l’affaire Lewinsky, ou partagerait des sextapes compromettantes de Donald Trump, quelques années plus tard.

Parallèlement, Larry Flynt s’érige en mogul de la presse spécialisée via sa société Larry Flynt Publications, fondée en 1976, qui décline le concept Hustler en différentes niches : Hustler Taboo (fétichisme et urophilie), Barely Legal (modèles « teen »), Beaver Hunt (contenu amateur) ; et se diversifie à travers des périodiques de musique ou de jeu vidéo. Sa société de production Hustler Video rencontre elle aussi un franc succès à travers ses parodies pornographiques mettant en scène des personnalités médiatiques ou politiques.

L’indomptable Larry Flynt était en outre le dernier représentant d’une espèce d’entrepreneurs aujourd’hui disparue ; une ancienne génération, pleine de faste et de prestige, qui percevait et catalysait le propos éminemment subversif, politique et libertaire du X. À l’heure de la pornographie de masse, de la banalisation de la production et de la main-mise des technocrates discrets sur le milieu, c’est plus qu’une icône qui s’est éteinte hier, c’est une certaine idée du métier.

Titulaire d'une maîtrise en cinéma, auteur d'une Porn Study à l'Université Paris VII Diderot, Clint B. est aujourd'hui chroniqueur de l'actualité porno.

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